Hommage des Acadiens de la Nouvelle-Écosse au professeur Marc-Adélard Tremblay

J. Alphonse Deveau


Références bibliographiques


Ma première rencontre avec le professeur Marc-Adélard Tremblay remonte aux années 50, lorsque je me suis joint à l'équipe de recherche sur le développement communautaire de l'Université Cornell. J'ai tout de suite été frappé par la personnalité et le savoir de ce jeune Québécois, qui se distinguait par ses grandes qualités humaines, jointes à son esprit scientifique. Il a toujours fait preuve d'une grande sollicitude à l'égard des gens qui faisaient l'objet de ses recherches.

Son travail l'a amené à développer des relations avec des gens de différentes classes sociales, dans des communautés rurales, et il s'est montré sympathique à tous, grands ou petits, riches ou pauvres. D'origine étrangère, il a su se faire accepter par le groupe ethnique acadien, et ce, tant par l'élite que par les plus démunis. De cette façon, il a pu étudier ce milieu du point de vue anthropologique. C'est avec affection qu'on se rappelle encore Marc-Adélard Tremblay.

Mieux que tous les autres chercheurs, étrangers ou Acadiens, Marc-Adélard Tremblay a su comprendre les caractéristiques de la société acadienne traditionnelle et contemporaine. L'analyse des aspirations et des valeurs de deux groupes ethniques, issus d'un comté situé au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse constitue l'objet de son étude. On trouvera ses conclusions, exprimées de façon claire et lucide, dans People of Cove and Woodlot (1960), « Niveaux et dynamismes d'acculturation des Acadiens de Portsmouth » (1961) et « Les Acadiens de la Baie Française » (1962).

Marc-Adélard Tremblay s'est intégré au groupe qu'il étudiait. Sa maison était toujours grande ouverte. Il a pu ainsi observer de près les us et coutumes, son attitude respectueuse et ouverte mettant les gens à l'aise et attirant les confidences. Nul autre n'aurait pu mieux que lui faire l'étude approfondie de l'institution familiale dans un village de la Baie-Sainte-Marie, L'Anse-des-Lavallée (Tremblay, 1965). Cette étude a servi de modèle pour la recherche sur l'institution familiale en milieu rural. Les gens de ce village voient dans cet ouvrage un reflet de leur histoire et de leur vie sociale, économique et familiale.

Le professeur Tremblay est le premier à avoir affirmé que la survie des Acadiens comme groupe ethnique est intimement liée à leur vision spiritualiste du monde. Pour les Acadiens, tout dans la vie doit viser à la récompense éternelle, le Paradis. En d'autres mots, « le spirituel prime sur le matériel ».

Dans « Niveaux et dynamismes d'acculturation des Acadiens de Portsmouth », cité plus haut, il fait preuve d'une compréhension profonde des différentes idéologies, tant protestante que catholique, tant anglaise qu'acadienne, et des diverses aspirations des deux groupes en présence. Le fait d'avoir vécu parmi ces gens et de s'être intégré à eux lui a permis d'approfondir sa connaissance des divers milieux en présence.

Grâce à ses recherches sur les Acadiens de la Nouvelle-Écosse, le professeur Tremblay a grandement contribué à mettre à jour les valeurs, les sentiments et les aspirations des Acadiens vivant dans cette province. Il a ainsi valorisé l'idéologie acadienne auprès des autres groupes francophones d'Amérique et d'Europe, et il a même amené les Acadiens à s'ouvrir les yeux sur leurs propres forces et faiblesses.

De même, dans « La société acadienne en devenir, l'impact de la technique sur la structure sociale globale » (Tremblay, 1967), il élabore un plan qui va contribuer à la survie du groupe ethnique acadien de la Baie-Sainte-Marie : le développement économique, la hausse du niveau de scolarité, la démocratisation de l'élite et l'aménagement de l'espace social. Quoiqu'il se garde de prophétiser dans ce sens, plusieurs de ses recommandations se sont réalisées depuis.

Lorsqu'il fut question de déménager le Collège Sainte-Anne, maintenant l'Université Sainte-Anne, dans un milieu anglophone, le professeur Tremblay a pris la défense de l'institution et, à force d'arguments d'ordre social et culturel, a contribué à convaincre les autorités que le Collège Sainte-Anne devait rester sur son site actuel et être agrandi. Pour cette raison, tous les Acadiens de la Nouvelle-Écosse ont envers lui une dette de reconnaissance.

Depuis ma première rencontre avec Marc-Adélard, mon admiration et mon amitié pour lui n'ont fait qu'augmenter. Animé d'un esprit scientifique des plus poussés, de dons littéraires dont témoignent ses nombreuses publications, d'une grande bonté d'âme, il mérite tous nos éloges au moment de sa retraite.

Références bibliographiques

CIBLE.GIFTremblay, Marc-Adélard, Charles C. Hughes, Robert N. Rappoport et Alexander H. Leighton, 1960. People of Cove and Woodlot : Communities from the Viewpoint of Social Psychiatry. Vol. II, Stirling County Studies. New York : Basic Books, 574 p.

CIBLE.GIFTremblay, Marc-Adélard, 1961. « Niveaux et dynamismes d'acculturation des Acadiens de Portsmouth », Anthropologica. Vol. III (1) : 202-251.

CIBLE.GIFTremblay, Marc-Adélard, 1962. « Les Acadiens de la Baie française : l'histoire d'une survivance », Revue d'Histoire de l'Amérique française. Vol. XV (4) : 526-555.

CIBLE.GIFTremblay, Marc-Adélard, 1965. « L'institution familiale à l'Anse-des-Lavallée », Recherches sociographiques. Vol. VI (3) : 237-263.

CIBLE.GIFTremblay, Marc-Adélard, 1967. « La société canadienne en devenir : l'impact de la technique sur la structure sociale globale », Anthropologica. Vol. VIII (2) : 329-350.


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