L'horizon de la culture

Hommage à Fernand Dumont



Sous la direction de

Simon Langlois et Yves Martin




Les Presses de l'Université Laval
Institut québécois de recherche sur la culture




Sainte-Foy, 1995


(Verso de la page titre de l'édition papier)

Les Presses de l'Université Laval reçoivent chaque année du Conseil des Arts du Canada et du ministère de la Culture et des Communications du Québec une subvention pour l'ensemble de leur programme de publication

Le 1er janvier 1994, l'Institut québécois de recherche sur la culture est devenu, en vertu de la loi 109, le huitième Centre de recherche de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS-Culture et Société).


Données de catalogage avant publication(Canada)
Vedette principale au titre:
       L'horizon de la culture. Hommage à Fernand Dumont
       Comprend des références bibliographiques.
       Publ. en collab. avec : Institut québécois de recherche sur la culture.             ISBN 2-7637-7428-8 (Les Presses de l'Université  Laval)
       ISBN 2-89224-248-7 (Institut québécois de recherche sur la culture)

1. Culture - Aspect sociologique. 2. Dumont, Fernand, 1927-  .  -Pensée
politique et sociale. 3. Civilisation - 20e siècle. 4. Civilisation occidentale.
5. Sciences humaines - Philosophie. I. Langlois, Simon, 1947-  . 
II. Martin, Yves, 1929-  .

HN101.H67 1995             306.4                            C95-940630-1

Photographie de la couverture : Renée Méthot
Conception graphique de la couverture : Norman Dupuis
Mise en pages : Mariette Montambault


ISBN PUL 2-7637-7428-8
ISBN IQRC 2-89224-248-7
Dépôt légal, 2e trimestre1995 · Bibliothèque nationale du Québec


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Dans nos sociétés,
comme dans celles de jadis,
la culture tend à se constituer
comme une vision du monde explicite
à l'horizon de l'ensemble des individus.

Fernand DUMONT, Le lieu de l'homme


Remerciements

Nombreuses et spontanées furent les réponses à l'invitation que nous avons lancée à des collègues et amis de Fernand Dumont à participer à cet hommage devant souligner sa longue carrière d'intellectuel et de professeur. Nul plus que lui sans doute n'a exercé une influence aussi étendue au sein de disciplines et d'institutions différentes, ce qui explique la grande diversité des contributions rassemblées dans cet ouvrage.

La préparation de ce livre a été le fruit de plusieurs collaborations. Il faut souligner le patient travail de Ghislaine Marois, collaboratrice de longue date de Fernand Dumont, qui a non seulement préparé les textes, mais aussi coordonné les multiples communications avec les auteurs à partir du secrétariat de l'Institut québécois de recherche sur la culture – maintenant INRS-Culture et société.

Nos remerciements vont aussi au personnel de la maison d'édition de l'Institut, et plus particulièrement à Véronique Morin et Mariette Montambault qui ont mis en forme le manuscrit, de même qu'à Léo Jacques, son directeur. Nous remercions également le personnel des Presses de l'Université Laval. Il faut souligner l'excellente collaboration des deux maisons. Cette association n'est pas fortuite, car Fernand Dumont a partagé durant plusieurs années son temps entre l'Université Laval, où il a enseigné au département de Sociologie, et l'IQRC, qu'il a fondé en 1979 et dirigé pendant un peu plus de dix ans. Dans le contexte budgétaire difficile que connaissent en ce moment les institutions de recherche et d'enseignement, il importe de noter que le financement de cette publication, outre l'apport des deux maisons d'édition, a été assuré par des contributions financières de la direction de la faculté des Sciences sociales de l'Université Laval et de son département de Sociologie; nous tenons à exprimer notre gratitude à la doyenne de la faculté, Lise Darveau-Fournier et au directeur du département, Denys Delâge. Enfin, nous soulignons l'apport financier d'un donateur qui préfère garder l'anonymat.

S.L.etY.M.

Introduction

Simon Langlois et Yves Martin


Relisons la première phrase du Lieu de l'homme: « Depuis que les hommes parlent, depuis qu'ils écrivent, ils ont voulu ramener le mutisme de l'univers et leurs sauvages intentions intimes à des horizons repérés et à des angoisses fondées1. » Fernand Dumont s'est donné très tôt le projet intellectuel de montrer comment se construit cet horizon de la culture et il en a exploré tous les aspects dans une oeuvre au sens fort du terme, dans un ensemble intégré de travaux qui trouvent leur unité et leur cohérence autour de ce concept d'horizon. Le titre donné au présent ouvrage s'est ainsi imposé de lui-même.

Nous avons voulu offrir à Fernand Dumont plus que des mélanges, plus qu'un liber amicorum. Ce livre a été certes conçu dès l'origine comme un festschrift, dans la grande tradition allemande, comme un hommage à un collègue estimé, à un écrivain reconnu, à un ami à qui l'on veut exprimer son attachement. Mais il a aussi pris rapidement une autre dimension: celle d'un ouvrage d'ensemble autour et à partir de la pensée d'un maître qui a marqué son époque, tant chez lui, dans ce lieu d'où il a parlé et écrit, qu'à l'extérieur, où ses travaux sont reconnus.

Les différentes contributions rassemblées dans cet hommage commentent un aspect ou l'autre de la pensée de Fernand Dumont ou encore la prolongent en explorant plus avant des pistes qu'il a balisées. Le lecteur reconnaîtra d'emblée, dans l'intitulé de chacune des sept premières sections, une dimension de son oeuvre ou la référence à l'un des chantiers qu'il a défrichés. Nous esquisserons brièvement comment il a lui-même abordé ces dimensions dans ses propres travaux.

Si la culture est bien un lieu, « ce n'est pas comme une assise de la conscience, mais comme une distance qu'elle a pour fonction de créer », écrit Fernand Dumont dans Le lieu de l'homme2. Il s'imposait de mettre en évidence dès le départ ce maître ouvrage de Dumont – son livre probablement le plus connu, le plus cité, celui aussi que son auteur a lui-même choisi pour représenter l'ensemble de son oeuvre lors d'une exposition organisée par la Bibliothèque nationale du Québec – en proposant des études qui s'en inspirent directement.

Livre riche, on y trouve une théorie originale de la culture: culture première et culture seconde, dédoublement et stylisation sont des concepts devenus classiques, qui délimitent un cadre d'interprétation du monde. La culture première est un donné, un milieu, un ensemble de significations, de modèles, d'idéaux. L'environnement a d'abord un sens pour l'acteur. Au ras de l'existence, « je vis dans la continuité de ces significations sans cesse tissées entre moi, les objets et les autres hommes3 ». Mais l'individu décroche de son milieu immédiat. Il est capable de prendre distance. Il développe une vision du monde, acquiert une conscience historique, adhère à des idéologies, produit des oeuvres de culture qui incarnent la signification du monde. La stylisation est au coeur de ce processus de dédoublement et c'est par elle que s'affirme l'autonomie de l'objet culturel.

Il convenait dans cet hommage d'accorder une large place à l'épistémologie et à la philosophie des sciences humaines. Fernand Dumont a écrit des pages remarquables sur la science économique, la sociologie, l'histoire, la littérature, sans oublier la philosophie, la théologie et les sciences de la religion. Tous ces travaux soulèvent les mêmes interrogations. Quels sont les fondements des discours savants en sciences humaines? Comment la raison marque-t-elle la culture? Pour reprendre une expression qui lui est propre, on peut avancer que Fernand Dumont convoque les sciences de l'homme à un même carrefour en réfléchissant sur le drame de la raison à la recherche de sa signification, notamment dans La dialectique de l'objet économique, dans L'anthropologie en l'absence de l'homme ou dans L'institution de la théologie.

Fernand Dumont a accordé une attention particulière à l'histoire et à l'historiographie, plus largement à la mémoire. Il n'a jamais cherché à idéaliser ce que Nietzsche a appelé le passé-antiquaire. Il a plutôt essayé de comprendre d'où l'on venait et il a avoué lui-même avoir voulu aider les Québécois à se réconcilier avec leur passé. « Pas plus dans la vie collective que dans la vie personnelle, on ne devient adulte en s'acharnant contre son existence antérieure4. »

Fernand Dumont n'a jamais caché sa foi chrétienne, on le sait. Pour lui, « la référence à la transcendance est nécessaire aux cultures comme à la raison ». Mais la foi n'explique pas seule cette référence à la transcendance, car celle-ci « représente plutôt la faculté de ne point se confiner à un statut fixé du sujet, aux situations qu'il rencontre, aux fins qu'il poursuit5 ». Sa pensée sur ce point précis n'a pas toujours été bien comprise ; aussi faut-il espérer qu'elle sera mieux saisie après la lecture des textes qui apparaissent dans la section sur la transcendance.

L'universel s'ancre d'abord dans le particulier. La pensée et la théorie se nourrissent de la société même dans laquelle elles s'élaborent. Cet ancrage est peut-être plus vrai pour Fernand Dumont que pour tout autre penseur contemporain. Si les intellectuels sont à l'évidence nourris et inspirés par leur milieu et par leurs expériences, il ne leur arrive pas à tous de l'expliciter, de le reconnaître même. Fernand Dumont s'est attardé très tôt à traduire en pensée son appartenance québécoise, son attachement au milieu ouvrier. Relisons la belle page dans laquelle il esquisse deux portraits parallèles, celui de son père Philippe Dumont et celui de son maître Gaston Bachelard6. Sa théorie du dédoublement n'est-elle pas d'abord inspirée de son propre itinéraire? « À ceux qu'ont agacés mes rappels épisodiques de Montmorency, je dois avouer une faute plus grave encore: même mes livres théoriques ne parlent pas d'autre chose. Les questions qui m'ont occupé, de l'épistémologie à la sociologie de la connaissance et de la culture, n'ont pas d'autre foyer7. »

Fernand Dumont l'a maintes fois répété: il parle et écrit du Québec. « Enfin, s'attachant à la culture, on ne saurait dissimuler l'endroit particulier où on en parle. L'étude du Québec n'est pas, pour moi, une spécialité de surplus: elle m'est exigée par l'ensemble de mon dessein8. » Si le Québec a été le lieu d'où il a écrit, il a été aussi en retour le lieu qu'il a interprété. Sa magistrale Genèse de la société québécoise est une oeuvre forte, qui a le double intérêt de proposer une sociographie d'une société particulière, mais aussi un instrument de lecture de toute référence nationale.

Enfin, Fernand Dumont a été très engagé dans les affaires de son temps. Il a fondé des revues et des centres de recherche, il a dirigé des collections scientifiques, donné des conférences, dispensé un enseignement très suivi et dirigé de nombreux étudiants. Ses engagements ont aussi débordé les cadres de la cité savante, car il a été fort actif et très présent sur la place publique. Sa signature dans les journaux a marqué plusieurs débats publics, il a présidé une grande commission de réflexion sur l'Église du Québec, il a témoigné devant des commissions parlementaires, mais il s'est aussi de nombreuses fois adressé à des auditoires plus modestes, allant des assemblées syndicales à des associations de bénévoles. Il a même fréquenté l'appareil de l'État, le temps de coordonner la rédaction d'un important livre blanc sur la culture et de participer à l'élaboration de la Charte de la langue française. Les témoignages réunis à la fin de l'ouvrage rendent hommage au collègue et à l'ami, mais aussi à l'homme public et à l'écrivain.

NOTES

CIBLE.GIF1. Fernand Dumont, Le lieu de l'homme, Montréal, Hurtubise-HMH, 1968, p. 9.

CIBLE.GIF2. Ibid., p. 230.

CIBLE.GIF3. Ibid., p. 61.

CIBLE.GIF4. Fernand Dumont, Le sort de la culture, Montréal, L'Hexagone, 1987, p. 245.

CIBLE.GIF5. Ibid., p. 186.

CIBLE.GIF6. « Voici, près de ma table, la photographie de mon père. En salopette de travail, il est debout à côté de la turbine dont il a eu longtemps la responsabilité à l'usine de Montmorency. [...] Et voici, sur le mur opposé, la photographie de Gaston Bachelard, l'un des maîtres de ma jeunesse » (Le sort de la culture, p. 129).

CIBLE.GIF7. « Itinéraire », dans Jean-Charles Falardeau, La sociologie au Québec, Québec, Les Presses de l'Université Laval, 1975, p. 255.

CIBLE.GIF8. Le sort de la culture, p. 15.


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