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Sources manuscrites
CLERCS DE SAINT-VIATEUR

Établis au Québec en 1847, les Clercs de Saint-Viateur adressent à leur supérieur et fondateur, l'abbé Querbes, des rapports dans lesquels on retrouve des descriptions du fonctionnement des écoles, du comportement attendu des élèves, et parfois des références aux manuels en usage.

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Lettre du f. Étienne Champagneur.

"L'Industrie le 6 Juin 1847.

Monsieur Querbes Supérieur des Clercs de St. Viateur
à Vourles près de Lyon.
Rhône, France. par Liverpool.

Mon très-cher et très-révérend Père,

Nous voilà déjà installés à l'Industrie depuis le 29 Mai. Nous connaissons assez comment iront les affaires pour vous donner là dessus quelque détail. D'abord, je vous dirai que nous étions désirés et bien désirés dans le pays, aussi nous avons été bien reçus. Monsieur Joliette craint toujours de ne pas assez nous faire. On a été très-satisfait de la robe de soie, on en fera un ornement pour l'église. Les journaux parlent de tous côtés de notre ordre. Il faut savoir que tout ce qui porte la soutane dans le pays est estimé. Notre costume est bien goûté, et on est satisfait de nos manières d'agir. On dit: on dirait que ces messieurs sont du pays tant ils sont gais et joyeux. Monseigneur nous avait avertis d'avoir un maintien gai, un air joyeux, si nous voulions gagner l'estime des Canadiens qui sont d'un caractère joyeux.

Il ne faut pas croire que les Canadiens soient sauvages, non bien loin de là, ils sont très polis et parlent bien le français et tous parlent bien français. Il n'y [a] point de patois, tous parlent également français. Ce sont des descendants des enfants de la vieille France, ayant le même esprit de foi et de religion; mais le plus grand nombre très-ignorant sur cet article; par conséquent il y a un très grand bien à faire.

Les naturels du pays sont sauvages, ils habitent des lieux reculés des villes et des villages où ils viennent vendre des objets aussi curieux qu'industrieux. Un grand nombre est catholique et a des prêtres pour les diriger, ils ont appris leur langage; mais un plus grand nombre encore est idolâtre. Les protestants cependant ne peuvent les convertir à leur religion. Ils disent à leurs ministres, tu n'es pas envoyé du grand esprit, toi ? tu as une femme et des enfants, tu travailles pour toi et pour ta famille ? Mais quand ils trouvent un prêtre ils lui disent: Ô robe noire, tu es envoyé par le grand esprit, tu n'as pas de femme, tu travailles pour nous et pour le grand esprit.

Une autre fois je vous parlerai du pays. Il est nécessaire que je vous entretienne aujourd'hui de nos affaires. L'Industrie est un bourg à peu près de la grandeur de Vourles. Il n'y a que 23 ans qu'il existe. Là où il est bâti ce n'était autrefois qu'une vaste forêt. M. Joliette a fait couper le premier arbre en 1824. Il est situé à 5 lieues du fleuve St. Laurent avec lequel on veut le faire communiquer par un chemin de fer, de Montréal il faut remonter ce grand fleuve une distance de 10 lieues. L'Industrie se trouve dans une belle plaine au milieu de 5 à 6 autres bourgs aussi consiédrables.

La maison où nous sommes est assez belle, mais dans la suite elle ne sera pas assez grande. M. Joliette nous a dit: Je ferai bâtir une autre aile quand vous voudrez. Il est certain qu'il le fera quand il verra que nous sommes à la gêne, car il ne rêve que collège. On appele [sic] ainsi cette maison. Nous y avons trouvé 4 Messieurs qui font la classe à environ 42 pensionnaires. À la fin de juillet ils vont quitter cette maison. Il y a un jeune prêtre, deux abbés et un laïque, professeur d'anglais.

L'usage de ce pays est que les pensionnaires aillent prendre leurs repas en ville. On leur donne pour cela 20 minutes. Ils couchent au collège. Ils donnent 12 piastres, c. a. d. 72 francs chacun. On nous assure que l'année prochaine nous en aurons près de 100, ce qui ferait 7200 fr. À bien considérer il vaut mieux avoir de ces sortes de pensionnaires, au reste les parents le préfèrent. Les enfants qui sont admis dans ce collège, savent lire, écrivent passablement et ont quelques principes de grammaire. Nous aurons à leur apprendre la langue française y compris une rhétorique française avec tout ce qui s'en suit, les mathématiques, le dessin et la langue Anglaise. Il faut que je vous dise qu'ils ne sont pas encore bien forts, mais quand ils seront restés 4 ou 5 ans ils sauront quelque chose. Monsieur Joliette, voyant que les enfants après avoir resté 7 à 8 ans dans un collège à étudier le latin ne savaient rien ou presque rien pour se livrer à quelque genre d'industrie, a voulu fonder un collège français. Pour le progrès des enfants et le bon ordre, nous serons obligés de suivre l'ordre qui est déjà établi, sauf quelques petites réformes à faire. On a divisé le temps du travail en classes et en études.

Il y a outre cette maison, l'école communale qui rapporte 45 louis, c. a. d. 980 francs. C'est un homme marié qui fait cette classe et qui doit se retirer si nous pouvons le faire. Il laisse les enfants dans la plus grande ignorance sur la religion, il s'adonne à la boisson. Nous avons 72 arpents de terrain qui nous appartiendra et que nous ferons cultiver. Les domestiques sont très cher [sic], celui qui est dans la maison gagne 30 francs par mois, et la cuisinière a une assez bonne solde aussi.

Il y a beaucoup de bien à faire, mais nous sommes trop peu. Il est impossible que nous nous chargions de l'école du village si nous ne sommes pas davantage. Mais si nous ne la prenons pas cette année, une autre il n'y aura pas moyen. Il faut par conséquent que vous nous envoyiez du monde: deux autres confrères et un père. C'est de toute nécessité, et vous ferez le plus grand plaisir à Monsieur Joliette. Si vous l'obligez ainsi il fera tout ce que vous désirerez. Ce sera un ami fidèle de la maison de Vourles. Il est ensuite certain que M. Manseau, qui est âgé de plus de 60 ans et qui a travaillé long temps dans les missions, ne peut pas se charger de confesser tous nos enfants, d'autant plus qu'en hiver les enfants ne peuvent pas aller à l'église à cause du froid. Nous avons une salle où M. le grand vicaire et M. Joliette nous ont dit qu'on ferait une chapelle. Ensuite nous ne pouvons pas avoir un prêtre, parce qu'il y en a pas dans le pays, d'autant plus que ce n'est pas de l'intérêt de notre société, car il faut que je vous dise quel est le but de M. Joliette, qui l'a communiqué à plusieurs et qui vous le dira peut être lui-même à vous-même. Il veut que l'église de l'Industrie appartienne à la société des Clercs de St. Viateur. Elle possède un terrain de 100 arpents environ. On prétend que l'église rapportera beaucoup. Elle est remplie de bancs et on les loue très-cher. Un de ces messieurs qui sont à la maison, me disait: si la cure vous appartenait voici à peu près le revenu que vous pourriez vous faire: 300 louis le collège, 200 louis les terres du collège, 45 louis l'école communale, 300 louis l'église, 200 louis les terres de l'église, total 1045 louis ou 25080 francs, mais ce n'est pas tout de suite qu'on peut faire un tel revenu. N'importe que si les Clercs de St. Viateur prennent bien en Amérique, il est certain que la Maison Mère pourra en retirer beaucoup.

L'Industrie peut être un asile pour les Clercs, ou du moins pourra certainement les soulager. Les gens du pays ne sont pas difficiles à gouverner, le curé fait tout ce qu'il veut avec M. Joliette, ils sont seulement ignorants en fait de religion. Réfléchissez, et voyez ce que vous avez à faire; mais je puis vous dire que si vous n'envoyez pas un père et des frères, mais surtout un père, vous facherez [sic] M. Joliette; au contraire si vous envoyez un père, demandez à M. Joliette ce que vous voudrez. Au reste il veut rendre les Clercs riches et si nous sommes satisfaits de ce procédé, nous le sommes à cause de notre Maison Mère de Vourles, qui a bien besoin qu'on l'aide. J'ai dit à M. le grand vicaire que la Maison Mère faisait de grands sacrifices et qu'elle n'était pas riche. Il m'a dit: M. Joliette donnera l'argent nécessaire pour faire venir des frères, et en effet il va demain à Montréal pour s'arranger de manière que vous puissiez toucher l'argent qu'il vous faudra. Il va vous écrire lui-même. Il vaut mieux que vous laissiez languir un peu les établissements de France pour nous envoyer du monde. Mais au reste vous avez assez de monde. Il nous faut un frère qui soit capable de travailler dans la maison et au jardin. De tous ceux que je connais, c'est Joseph Fayard qui nous conviendrait le mieux. Il nous en faut un autre pour la classe, M. Chaumier ferait bien, à cause de la musique. M. Dalvergne pourrait nous faire et mieux encore M. Achard et M. Thion ou quelqu'autre, qui pourrait enseigner la musique et faire une classe et nous aider surtout pour le dessin. Il ne faut pas que l'Amérique les effraye, nous sommes dans une nouvelle France. Il faut au moins que ceux que vous nous enverrez sachent bien parler français, et que leur physique soit convenable, n'envoyez ni bossu ni borgne, etc., etc. Avec Jose ph Fayard nous pourrions peut-être nous passer de domestique et de cuisinière, ce serait une douzaine de francs d'économisés. Les vivres sont chères.

Mais j'oubliais de vous dire que si Monseigneur nous donne un prêtre, ou il sera comme économe, ou comme directeur. En passant à Montréal j'ai cru d'entrevoir qu'on voulait nous donner un prêtre pour directeur qui avait été placé avec d'autres abbés ou prêtres et qui n'avait pas pu s'accorder. C'était une espèce d'ordre que Monseigneur voulait établir et qui n'a pas pris. Il est certain que nous ne pouvons recevoir de prêtres que comme aumônier et encore il ne faudrait pas qu'il restât dans la maison, tout ce qui se passerait dans la maison il le saurait et il pourrait résulter de grands inconvénients. S'il est placé à la cure pour aider à M. Manseau il peut être placé, à la mort du grand vicaire, comme curé, et frustrer ainsi la cure aux Clercs. Il faut savoir que les Jésuites et les Sulpiciens ont tous des cures qui leur rapportent beaucoup. Il faut que vous sachiez que M. Joliette est âgé et qu'il est très gros, gras et puissant, et qu'il peut mourir au moment où on y pensera le moins. Si un père vient on peut faire arranger les affaires comme on voudra. Ainsi il est nécessaire que vous nous en envoyiez un au moins pour un an, il est si facile de faire la traversée. Il y a maintenant des bateaux à vapeur qui la font dans 14 jours et à assez bon marché. Il y a des places à 1000 fr., à 500 fr. et 300 fr. tous les mois. Il y a aussi des vaisseaux qui partent pour New-York. Pour cela vous pourriez écrire à M. Marziou rue d'Orléans No 79 au Havre. Vous lui diriez que ce sont des frères pour M. Bourget, Évêque de Montréal.

Tout est très cher en Amérique, par conséquent on ferait bien d'apporter en venant, des livres de géométrie, de physique, de chimie, de dessin linéaire, des estampes, des images, des médailles, des chapelets, un chemin de croix, des christs et ce qui est nécessaire pour notre chapelle, des modèles de dessin à bosse, du papier soit à lettre, soit à dessin, une méthode de flûte, avec une flûte, je la connais assez pour pouvoir donner des leçons aux commençants, quoique je n'aie pris que 6 mois de leçons, des crayons de toute espèce. Tout ce qui regarde la classe ne paye pas de droits, mais le drap et la soie payent beaucoup.

Dans les écoles du pays on lit le devoir d'un chrétien. Nous avons apporté avec nous quelques doctrines chrétiennes qui nous serviront pour les novices. Si vous voulez qu'on donne aux enfants la doctrine chrétienne il faudra nous en envoyer, ou bien nous ferons prendre le devoir d'un chrétien si vous voulez. Ceux qui sont pauvres nous ne pourrons guère leur faire acheter une doctrine chrétienne. On suit la grammaire de Lhomond, celle de Noël et Chapsal est un peu compliquée pour les enfants canadiens. Ils ne peuvent pas mordre toujours dans celle des frères.

Il serait bon que le frère qui nous aidera à faire la classe eut la soutane. Tachez [sic] de nous envoyer des gens obéissants. Ordinairement ceux qui ont été maîtres quelques temps, ont de la peine à se plier à l'obéissance. Quoique un père vienne, envoyez nous des gens qui soient souples. Il faut que vous nous envoyiez M. Fa[v]re, c'est celui qu'il nous faut pour nous mettre en bonne réputation. Envoyez-le au moins un ans, vous nous en enverrez après un autre, si vous ne voulez pas le laisser. Un voyage d'une vingtaine de jours n'est pas grand chose, nous sommes tout près de l'Europe. Pour l'intérêt de la Société il vaudrait mieux que vous vous procuriez un prêtre pour vicaire que de nous laisser nous autres sans prêtre.

Vous direz que je tiens à avoir un père. J'y tiens, notre très révérend père, pour l'intérêt de la Société, et c'est M. Fa[v]re qu'il nous faut, et il fera un bien immense dans le pays. Et il nous attirera la confiance et nous aurons beaucoup plus d'élèves et de novices. Nous en avons déjà deux de certains. Nous les prendrons au mois d'Août, ce sont deux jeunes gens bien pieux. M. le Curé nous a dit qu'il en répondait. Il y en a un qui nous aidera pour l'Anglais, mais non [.. ? .. ]. L'autre pourra aider à celui qui fera l'école du village. Nous en aurons d'autres, je pense. En descendant à New-York nos confrères iront à un hôtel français ( Union Hotel ) tout près du port. Ensuite ils demanderont la route de Montréal. On les mettra au courant des affaires en matière de chemin, mais il faut qu'ils arrivent avant la fin d'Août.

En attendant le plaisir de voir nos confrères, nous vous prions de nous croire toujours, notre très cher Supérieur, vos enfants les plus attachés et les plus soumis,

Champagneur."

Retranscription dans Dossier Querbes - Correspondance reçue par le père Louis Querbes - Volume 19 - 1847, s.l., Les Clercs de Saint-Viateur, 1964, p. 144-147.

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Lettre du f. Étienne Champagneur.

"L'Industrie le Juillet 1847

Notre très cher et très-révérend Père,

C'est pour la 3e fois que nous vous écrivons du Canada et pour la 2e de l'Industrie. Nous voulions d'abord attendre une de vos lettres avant de vous écrire de nouveau; mais sentant le besoin de vous parler encore de l'état de nos affaires, nous avons pris la résolution de vous écrire par le prochain courrier d'Europe, qui part le 28 du courant. Nous désirons aussi vous entretenir un moment de nous mêmes, et vous faire connaître quelles sont nos occupations et quel est notre genre de vie pour le moment.

D'abord l'état de notre santé est assez florissant in omnibus. La joie et la paix règnent dans notre azile [sic], de sorte que les ennuis et les noirs soucis ne nous ont pas encore affligés et la discorde n'a point semé la désunion parmi les Clercs de l'Industrie. D'où il résulte que notre physique et notre moral vont toujours de mieux en mieux et de compagnie sans que ce dernier n'aille clopin clopant, car autrement il serait à craindre que le pot de fer brisat [sic] le pot de terre.

M. Chrétien a cependant un peu maigri, les chaleurs excessives qu'il a fait l'ont un peu éprouvé. Quand il fait bien chaud le ciel est brumeux et le soleil paraît à peine, parfois il est rouge et conserve cette couleur jusque vers 10 heures du matin, et le soir il reprend la même couleur jusqu'au coucher. Il ressemble entièrement à un boulet rouge qu'on apercevrait au milieu des maisons et des arbres, et cependant il fait alors une chaleur étouffante, on dirait que les maisons ont été chauffées pendant longtemps, on est obligé d'établir des courants d'air. La nuit on cuit de chaleur, les grillons font entendre continuellement leur cri monotone pendant toute la nuit, notre maison en est remplie. Les nuits sont quelques fois très froides. Au reste la température passe subitement du chaud au froid et vice versa. Dans 24 heures on éprouve les quatre saisons. On dit que les hivers sont terribles, c'est l'expression du pays. On chauffe des poèles [sic] pendant la nuit dans l'intérieur des maisons. Dans l'établissement où nous sommes, quatre énormes poèles ont ronflé nuit et jour pendant l'hiver dernier, deux dans le dortoir où étaient 40 pensionnaires et où on peut en loger 70 à peu près, et deux autres dans différentes parties de la maison. Il faut un bon ouvrier pour pouvoir alimenter continuellement ces poèles.

Mais le bois n'est pas cher, les forêts nous environnent. Dans les champs et dans les prés on aperçoit des tas de bois qui pourrissent, ou bien on les fait brûler. Une partie de la plaine de St. Charles de l'Industrie est encore couverte de souches à moitié brûlées. L'Industrie se trouve bâti sur la rive droite d'une belle rivière qui prend sa source dans une forêt dont on ne connaît pas les limites. Tous les ans on fait charrier à cette petite rivière plusieurs milliers de sapins jusqu'à l'Industrie, où, au moyen de plusieurs moulins à scie, on en fait du madrier qu'on fait encore charrier sur la même rivière jusqu'au fleuve St. Laurent, le plus beau fleuve du globe. Là on l'embarque pour l'Angleterre et de l'Angleterre il arrive en France.

Le sol du Canada est plat, sablonneux et humide de sorte que la végétation pousse avec la plus grande rapidité. Les productions du Canada sont à peu près les mêmes que celles du nord de la France. On y fait venir cependant de beaux melons, des treilles sauvages donnent des raisins qui se laissent manger.

Notre maison qu'on appelle Collège Joliette, et qu'en France on appellerait pensionnat, se trouve sur le bord de la rivière, il en est séparé par la cour où les élèves prennent la récréation. La cour se trouve à peu près à 8 pieds d'élévation de la rive droite qui est assez large et couverte de gazon. La rivière coule à l'est du collège, au nord est un beau bois qui appartient à la Cure, distant à peu près de deux portées de fusil. Au sud se trouve [sic] les terres du presbytère et à l'ouest celles du Collège. L'église, la cure qui se tient avec, et le collège qui est tout près et que M. Joliette veut faire communiquer par une aile de bâtiment, se trouvent sur les terres de l'église. M. Joliette nous a dit que son projet est de céder aux Clercs l'église avec toutes les terres qui les environnent et lui appartiennent. La Chambre voulait qu'il passat [sic] un acte pour accorder à la paroisse tout ce qui concerne le presbytère; mais il n'a pas voulu le faire avant de voir si nous pourrions nous en charger, c. a. d. si vous pouviez fournir quelque clerc prêtre, capable de diriger cette cure qui va devenir considérable. On pourrait avoir des vicaires facilement, pourvu que nous ayons un père de France. D'après l'état des choses comme je les vois, M. Fa[v]re nous serait nécessaire une couple d'années.

Le 17 de ce mois j'ai eu une longue conversation avec M. Joliette. Il m'a dit: Un père arrivera sans doute dans peu de temps avec quelqu'autre frère. Il faut que notre collège soit bien monté, qu'il y ait un bon noyau, m'a-t-il dit, si nous voulons réussir dans notre entreprise. Il a [été] trouver [sic] ces jours derniers Monseigneur du Haut-Canada qui lui a dit que son projet était très-bien et que sitôt qu'il pourrait avoir des Clercs il tâcherait de mettre sur pied un établissement semblable. Il lui a promis qu'il nous enverrait des novices qui sussent l'Anglais. On parle cette langue dans le Haut-Canada.

Notre collège est connu sous le nom de Collège Joliette, collège français et anglais. M. Joliette nous a dit de ne recevoir au collège que les enfants qui sauraient lire et écrire assez bien. Ils doivent rester 4 ou 5 ans au collège après quoi s'ils veulent se faire prêtres ils étudieront quelque temps le latin et entreront ensuite au séminaire. Il nous a dit: Si plus tard M. votre Supérieur veut y établir un cours de latin il pourra le faire. Dans deux ans de latin un jeune homme qui connaît parfaitement le français peut bien entrer au séminaire. J'ai fondé cet établissement pour faire disparaître ce mauvais mode d'enseignement qu'il y a dans le pays: de faire étudier aux enfants quelques années de latin seulement , de sorte que quand ils sortent du collège, ils ne sont capables de rien. Voilà ce qu'il nous a dit. Le gouvernement voit d'un oeil favorable ces projets, aussi pour le récompenser, ou pour l'encourager, il a accordé 100 Louis à sa demande pour le collège. Ils seront payés tous les ans, de plus il espère y faire ajouter un autre cent Louis l'année prochaine. La petite école nous rapporte aussi 40 Louis de la part du gouvernement. Nous en sommes chargés depuis le premier Juillet. M. Chrétien la dirige et il s'acquitte fort bien de son emploi. M. Fayard fait le catéchisme aux enfants de la paroisse qui se préparent pour la 1ère communion, qui doit avoir lieu vers la fin de ce mois.

Nous allons commencer notre noviciat le 30 du courant, jour de St. Ignace. Nous avons déjà six jeunes gens recommandés par Monseigneur et M. le grand vicaire Manseau, qui doivent arriver le 28 ou le 29. Il y en a un qui est très instruit, sachant l'Anglais, le latin et le français, il est tonsuré, les autres sont assez instruits, il y en a un qui n'est bon cependant que pour la cuisine. Il était cuisinier dans un corps religieux que Monseigneur voulait former, mais à notre arrivée il nous a envoyé trois de ces jeunes gens sur 5 qu'il avait, les autres deux se sont retirés chez eux, à ce que je crois. La première fois que je vous écrirai je vous donnerai une note de ces pieux gens. Nous pensons que nous aurons d'autres novices. Tous les Curés feront leur possible pour nous en envoyer parce qu'ils désirent avoir des clercs.

M. Fayard va aussi faire le catéchisme à St Paul, à une lieue de l'Industrie. M. le Curé vient le faire chercher tous les jours en voiture à une heure après midi et nous le fait ramener à 5 heures. Il prépare les enfants jusqu'au jour de la 1ère communion. En ce moment-ci ceux de l'Industrie sont en retraite qu'il leur fait faire. Les Curés savent tout cela et tous désirent en avoir. Ils me disent quand j'en rencontre: Révérend frère, vous m'enverrez au moins le premier clerc que vous ferez. Le directeur des frères de l'école chrétienne nous dit quand nous fumes le voir: On nous appelle révérend frère et nos écoles on les appelle collèges, nous les laissons faire. C'est pour dire que c'est l'usage du pays. Parmi les novices, il y en a plusieurs qui n'apportent pas beaucoup de choses à la maison mais on nous a conseillé de les prendre.

Maintenant, vu le train et l'état de nos affaires, vous feriez bien de nous envoyer un Père qui puisse se charger de la paroisse, qui puisse prêcher d'une manière convenable, ensuite un Clerc qui eût un bon accent. Si vous ne pouvez pas nous en envoyer un ainsi, il vaut mieux ne pas nous en envoyer. Pour le train de la maison et pour la culture nous en aurons tant que nous voudrons. Si vous ne pouvez pas envoyer de prêtre, c'est à d. M. Fa[v]re, il vaut mieux que vous n'envoyiez pas de frères. Nous ferons sans frères, nous pourrions aussi faire sans un père, puisque Monseigneur nous a promis un prêtre qui logera à la cure, et qui nous confessera et nous dirigera pour le spirituel, et confessera les novices. Mais la communauté y perdra gros.

Sur les terres de l'église et sur les terres du collège il y a de belles prairies, le bois du presbytère qui est tout près du collège est une belle sucrerie, c'est à dire qu'il est rempli d'arbres à sucre. C'est la sève de l'érable qui fournit la matière pour le sucre. Il est [aus]si bon que le sucre qu'on a en France.

On vous avait demandé plusieurs frères parce que M. Manseau croyait qu'on n'aurait pas des Novices, mais maintenant il nous a dit que nous ferions bien de vous écrire pour vous faire connaître l'état de nos affaires. Pour l'administration nous avons des novices qui sont très capables et qui sont au fait de tout ça. Nous en avons d'autres qui nous aideront pour les basses classes. Il ne nous faut donc qu'un père et un frère qui puisse faire un bon cours de français, de calcul ou de mathématiques, etc. Le noviciat m'occupera une bonne partie du jour, mon dessein est cependant de faire une classe au collège. vous savez que M. Chrétien ne sait pas grand choses, il ne connaît pas du tout sa grammaire. M. Fayard n'est pas bien ferré et n'a pas l'usage de démontrer les choses un peu relevées. Et au collège il y a trois classes ou trois cours assez bien montés. Le 1er cours connaît entnt. l'Arithmétique, les élèves attendent qu'on leur apprenne maintenant ce qui suit le premier cours élémentaire.

Je crois, M. le Supérieur, que je vous ai assez fait connaître l'état des affaires pour que vous puissiez agir avec sagesse. Je vous ai parlé avec toute la sincérité possible, car je me trouve toujours dans la même disposition que je suis parti, que la volonté de Dieu soit faite et je suis toujours disposé à faire celle de mes supérieurs. La charge que vous m'avez donnée je la porte avec résignation mais si un père arrivait, je serais heureux de pouvoir la lui jeter sur les épaules. Comme j'étais heureux à Vourles! Mes chers confrères m'aident de leur mieux. Nous communions tous les dimanches. Je communie aussi le jeudi ainsi que M. Fayard. M. Chrétien vers le commencement nous a imités, maintenant il ne le fait pas.

[...]

Veuillez bien, notre très-cher et très-révérend père, nous écrire le plutôt possible afin que les lettres nous arrivent plus facilement, vous mettrez après l'adresse ces mots Anglais: per Steamer via Boston. Elles nous arriveront par les bateaux à vapeur. Le mot steamer désigne un bateau à vapeur. Il nous tarde beaucoup de recevoir de vos nouvelles, nous espérons en recevoir vers la fin de ce mois. Les vacances ont lieu le 20 de ce mois. Les messieurs qui sont au collège partent le 22 et nous resterons maîtres de l'établissement.

Nous avons écrit aux Clercs de St. Louis, nous n'avons pas reçu de lettre, nous ne connaissons pas bien leur adresse. M. le grand vicaire, M. Manseau, prend beaucoup d'intérêt pour le collège. M. Joliette ne rêve que collège. On a été très content du cadeau. On a dit que cette pièce de soie avait été faite dans les Ateliers des Clercs de St. Viateur.

Si vous nous envoyez un père avec un frère faites leur apporter tout ce qui est nécessaire pour un Collège français et pour le Noviciat en fait de livres et de cartes et de dessin en tout genre. Ceux qui sont engagés dans l'enseignement ne payent pas de droit. Qu'on apporte beaucoup d'images, beaucoup d'estampes pour en faire encadrer quelques unes. Les murs sont nus dans notre collège. Des petits livres pour récompenser à la petite école, et des livres pour le collège, soit pour prix à la fin de l'année, soit classiques, géométrie, physique, chimie, astronomie, etc. M. Joliette payera tout ça d'abord, et après on lui rendra s'il est nécessaire. À Montréal le moindre livre coûte immensément cher. Du Havre au Canada on ne paye pas de port. Madame Joliette nous a demandé une estampe de St Charles Borromée. N'oubliez pas de lui en envoyer une belle. La paroisse est sous le protection de ce St. On veut faire de la robe un ornement d'église. Il faut que je vous dise qu'un père ferait un grand bien dans la ville de l'Industrie. M. le grand vicaire est déjà très âgé, et ne peut guère exercer. On commence le chemin de fer qui doit joindre l'Industrie au fleuve St Laurent.

Agréez nos très humbles respects, notre très révérend père,

Champagneur.

Il n'y a pas de grammaire française dans le Canada qui puisse nous faire, il faudrait nous en envoyer deux ou trois cents de France. Il y a un calcul canadien qui est bon, nous avons des géographies et des histoires pour le pays.

J'ai fait arranger notre jardin, c'était un fond de terre marécageux."

Retranscription dans Dossier Querbes - Correspondance reçue par le père Louis Querbes - Volume 19 - 1847, s.l., Les Clercs de Saint-Viateur, 1964, p. 193-197.

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Code du collège Saint-Pierre de Chambly par le P. François-Thérèse Lahaye, 1849.

"Code du Collège Saint Pierre, Chambly

Article I.

Le collège Saint Pierre de Chambly, Bas Canada est dirigé par des Clercs de Saint-Viateur, dont l'ordre fut approuvé de N. S. Père le Pape Grég. XVI, en 1837, d'heureuse mémoire, et adopté dans le Diocèse de Montréal, par Monseigneur, Ignace Bourget, en 1847.

Article II.

Le cours, bien que basé d'une manière toute spéciale sur l'étude du Français, de l'Anglais et des mathématiques, embrasse pourtant généralement toutes les branches accessoires, propres à le rendre complet. Il commence par les langues vivantes et dure cinq années, après lesquelles le latin et le grec sont facultatifs.

Article III.

L'odre du jour, autrement [dit] le règlement quotident est le suivant:

A.M.
5 1/4 - Lever
5 3/4 " - Prière et lecture pieuse
6 " - Étude
7 " - Déjeûner [sic]
7 1/2 " - Sainte Messe
8 " - Classe
10 " - Récréation
10 1/4 " - Étude
11 3/4 " - Lecture de l'Évangile
Midi - Dîner
P. M.
12 1/2 heures - Récréation
1 1/4 " - Étude
2 " - Classe
4 " - Récréation
4 1/2 " - Étude
5 1/4 " - Chapelet
6 1/2 " - Lecture spirituelle
6 3/4 " - Souper
7 1/4 " - Récréation
8 1/4 " - Prière
8 1/2 " - Repos

Article IV.

Depuis la rentrée jusqu'au 29 Sept. inclusivement le congé se donne pour la journée. Du 29 Sept. à Pâques pour la demi-journée. De Pâques à la fin de l'année pour la journée. Il n'a jamais lieu qu'une fois la semaine, le mercredi.

Article V.

L'année scolaire commence vers le milieu de Septembre et se term[ine] au 15 Juillet ou, si le 15 se trouve être un jour de fête d'obligation, au jour le plus rapproché du 15.

Article VI.

Des examens privés ont lieu à différentes époques de l'année; mais immédiatement avant la sortie se font des examens publics sur toutes les matières étudiées pendant le cours de l'année. Ces examens sont entremêlés de morceaux oratoires, tragiques et comiques, puis terminés par une distribution solennelle de prix et de couronnes. L'un de nos Seigneurs les Évêques se fait un devoir d'y présider autant que possible. Tout le clergé d'alentour y est invité.

Article VII.

Les seules vacances de l'année ont lieu depuis la distribution des prix jusqu'à la rentrée, à la mi-septembre, ou à peu près, de graves motifs ayant fait abolir les vacances d'hiver.

Article VIII.

Le mode de pension jugé le plus convenable, le plus sûr pour la prospérité matérielle du Collège, et le plus propre à faciliter l'éducation aux masses est celui-ci: les élèves couchent, étudient et prennent leurs récréations. Ils en sortent trois fois par jour pour aller prendre leurs repas dans des pensions situées à proximité du Collège. Ils ont à chaque fois une demi-heure tant pour s'y rendre que pour manger et revenir, au son de la cloche. Le prix des pensions variant selon les ressources, chacun en prend une en rapport à ses moyens. Les enfants étant placés dans des maisons de confiance y prennent de bonnes manières. Ils en sortent moins neufs pour le monde. Ils n'ont pas d'ailleurs le tems [sic] de faire aucune connaissance dangereuse. De plus le Collège n'ayant pas à s'occuper de détails culinaires, a plus de tems à donner à l'éducation et plus de chance de ne pas se ruiner.

Article IX.

Les qualifications requises pour l'admission se réduisent à celles-ci: 1. Un certificat de bonne conduite du curé de la paroisse, 2. une certaine connaissance de la lecture et de l'écriture, 3. un corps sain, et robuste, exempt d'infirmités choquantes; 4. un certain degré d'aptitude aux sciences.

Article X.

Termes et conditions. Enseignement, logement, chauffage et éclairage £ 4 par an payables, moitié à la rentrée, moitié au mois de Février. Livres, fournitures, lit, quand il est fourni par l'établissement, cirage de chaussure, souscription à la bibliothèque, extrà [sic], payable avec le second terme du Collège. Musique 5/ par mois, payable au musicien de gré à gré.

Article XI.

L'uniforme est un habit bleu à col droit avec broderie bleue aussi, au col et aux manches, boutons noirs, plus une ceinture de ruban noir moiré. Le costume est de rigueur pour tous les Dimanches, jours de fête et de congé."

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Devoirs des maîtres collège Saint-Pierre de Chambly par le P. François-Thérèse Lahaye, 1849.

"Devoirs des Maîtres.

Article I. Ce que tout professeur doit exiger de ses élèves généralement.

1. Que chaque élève se rende en classe en silence, gravement et tête nue saluant le professeur, s'il faut passer devant lui; 2. que chacun se mette à genoux, joigne les mains et réponde à la prière; 3. Que chacun ait tous les livres nécessaires à son cours respectif, plus un cahier d'écriture, à part; 4. Que tous soient assis, le visage tourné vers la chaire du professeur; 5. Que deux parleurs ne soient jamais voisins; 6. Que les mains de chacun soient toujours visibles, sur la table; 7. Que tous les livres soient fermés pendant la récitation; 8. Que personne ne souffle la leçon; 9. Que personne ne sorte, sans un vrai besoin; 10. Que chacun se rende à l'heure; 11. Que chacun récite tous les jours quelque chose; 12. Que personne ne parle ou dérange ses voisins; 13. Que personne ne chique, soit gomme, soit autre chose, ou ne salisse l'appartement d'une manière quelconque; 14. Enfin, que les petits soient placés en avant des plus grands.

Article II. Ce que doit exiger le Maître d'Étude, en toutes circonstances:

1. Que tous se rendent tête nue, en silence et directement, chacun à sa place propre; 2. Que tous s'agenouillent des deux genoux, fassent le signe de la croix et répondent aux prières d'usage; 3. Que personne ne se lève, ou n'ouvre ses livres, qu'au signal convenu; 4. Que chacun observe le plus stricte silence, ayant toujours les deux mains visibles sur la table et évitant de remuer les pieds ou de se moucher avec bruit; 5. Que personne ne sorte; 6. Qu'il n'y en [ait] jamais deux d'absents à la fois; 7. Que chacun place ses livres en tel ordre, qu'ils ne tombent pas sur le plancher; 8. Que tous soient occupés des devoirs ou leçons à donner à la classe prochaine; 9. Que personne ne lise de livres prohibés, 10. Que personne ne commence à lire les livres appartenant à la Bibliothèque du Collège, sans les avoir auparavant couverts; 11. Que personne n'y écrive son nom, ni aucune autre chose, sous peine d'amende; 12. Que chacun, en sortant pour la classe, prenne les livres, papiers et articles nécessaires; 13. Que personne ne sorte avant son tour; 14. Enfin, que personne ne marche sur les bancs ou sur les tables.

Article III. Ce que doit exiger le maître de salles, ou maître de Récréation.

1. Que tous les élèves soient rendus à l'heure au lieu de la récréation, dans la salle des jeux en hiver; dans la cour en été; 2. Que les grands jouent avec les grands et les petits avec les petits; 3. Que les Anglais se mêlent aux Français et réciproquement; 4. Que tous s'expriment correctement dans la langue qu'ils parlent; 5. Que les mêmes n'aillent pas toujours avec les mêmes; 6. Que personne ne sorte du lieu de la récréation, sans permission, serait-ce même pour aller à la chapelle; 7. Qu'il n'en sorte jamais deux à la fois; 8. Que les enfants ne jouent à aucun jeu indécent ou dangereux; 9. Qu'ils ne courent jamais dans l'intérieur; 11. Qu'ils ne poussent aucun sifflement ou cri aigu et sauvage; 12. Qu'ils ne dépassent point les limites prescrites; 13. Qu'ils ne détériorent aucun banc, mur, table, clôture, ou aucun ameublement à leur usage, sous peine d'amendement et autre punition; 14. Qu'ils ne se donnent aucun surnom ridicule ou injurieux; 15. Qu'ils ne chantent aucune chanson profane ou licencieuse; 16. Qu'ils saluent, au passage, les maîtres et les étrangers; 17. Qu'ils ne se promènent pas moins de trois à la fois; 18. Qu'ils ne chiquent ni ne fument; 19. Que personne ne se moque de ses confrères en pénitence; 20. Qu'ils ne fassent entr'eux ni marché ni échange; 21. Qu'ils ne jouent ni argent ni aucune chose appréciable à prix d'argent; 22. Qu'ils ne prennent point les effets les uns des autres; 23. Qu'ils ne foulent aux pieds aucune harde, coiffure ou chaussure;

Article IV. Ce que doit exiger le maître de chant et de cérémonies.

1. Que tous, au son de la cloche, se rendent au lieu d'où l'on doit partir pour aller à l'église; 2. Qu'ils se munissent en silence de leur surpli [sic], jupon, barrette et livre de prières; 3. Qu'ils aillent deux à deux à la sacristie, sans courir, sans passer les uns devant les autres, 4. Que rendus au sanctuaire, tous fléchissent le genou, prennent leur place, s'assient [sic], se lèvent, se frappent la poitrine, se tournent, fassent le signe de la croix, inclinent soit la tête, soit les épaules, se couvrent et se découvrent, en un mot agissent comme un seul homme et selon les rubriques et le cérémonial. 7. Que personne ne baisse ou ne lève trop la vue ou ne la tourne de côté de la nef; 8. Que tous aient visibles par dessus le surpli, et la tête droite, mais sans hauteur; 9. que tous soient peignés, aient les mains et le visage propre [sic]; 10. Que personne ne crache ailleurs que dans son mouchoir ou dans le crachoir; 11. Que tous évitent de sortir, ou de déranger en aucune façon les fidèles en général et leurs voisins en particulier; 12. Qu'ils aient surtout soin de ne pas se passer la main dans les cheveux, ce qui est malpropre;

Article V. Ce que doit exiger le Directeur des sacristains.

1. Que l'autel soit balayé et essuyé tous les jours, ainsi que les meubles et la sacristie; 2. Que la chapelle se balaie en entier deux fois par semaine, et que les bancs soient essuyés; 3. Qu'il ne traîne ni livre ni papier ni coiffure soit à la chapelle, soit à la sacristie; 4. Que les cierges allumés pour la messe ou pour la récitation de l'office soient toujours d'égale longueur; 5. Que la lampe devant le Saint Sacrement soit toujours allumée, et pour cela, que la veilleuse soit changée à tems, or cette opération demande de la précaution, afin qu'il n'y [ait] pas d'huile répandue, soit [sur] l'embrasure des fenêtres, soit sur le plancher, soit en aucun autre endroit de la chapelle; 6. Que la préparation des ornements pour la messe se fasse toujours la veille, pour que le lendemain tout dérangement soit évité pendant la méditation; 7. Enfin, que les burettes, le linge, les ornements, tout soit propre et à sa place.

Article VI. Ce que doit exiger le Sous-Procureur.

1. Que tout le linge de la maison soit en ordre, à sa place, le propre et le net, avec le propre et le net, le sale avec le sale; 2. Que rien ne traîne dans les chambres, ni hardes, ni souliers, ni meubles cassés ou malpropres; 3. Que chacun ait ce qui lui faut; 4. Que le Règlement de la cuisine s'observe d'une manière exacte; 5. Que tous les apartements [sic] soient balayés et les meubles essuyés; 6. Que les vitres soient lavées de tems à autre; 7. Qu'il n'y ait pas d'huile répandue; 9. Que les lumières ne soient jamais placées de manière à noircir les murs ni les plafonds; 10. Qu'en hiver, le bois ne soit pas jeté ou lancé ni traîné, mais bien porté et déposé; 11. Que les bancs, tables et autres meubles soient conservés propres et décents. Pour cela ne pas attendre qu'un objet se brise entièrement avant de le faire réparer; 12. Que les dortoirs soient décents et montrables, à une heure quelconque du jour, dès neuf heures du matin; 13. Que les cours, basse cours et autres lieux soient tenus décents; 14. Que les harnais, les instruments aratoires, les outils d'atelier, tout respire l'harmonie et la propreté la plus scrupuleuse; Enfin, qu'il voie tout l'extérieur et tout l'intérieur du ménage.

Article VI. Ce que doit exiger le bibliothécaire.

1. Que la bibliothèque ne souffre ni détérioration ni diminution; 2. Qu'il ne sorte aucun livre, sans que note soit prise sur le champ; 3. Que le catalogue soit complet et toujours à portée; 4. Que la liste des souscripteurs soit coordonnée par lettre alphabétique et ajustée de manière à abréger le tems; 5. Que les ouvrages soient placés par ordre de matières; 6. Que note soit prise de celui qui aurait égaré ou gâté un volume; 7. Que les livres soient distribués par section ou par classe; 9. Qu'un anglais ne lise pas exclusivement des livres anglais et réciproquement; 10. Que personne n'entre dans la bibliothèque sans une permission toute spéciale; 11. Que la clef soit toujours en sa possession, c'est une clef qui ne se prête jamais.

Article VII. Ce que tous les maîtres ont à faire de concert, pour le maintien du bon ordre.

1. À chaque fois que la communauté entière est en marche, pour aller soit en étude, soit aux repas, soit à la chapelle ou ailleurs, tous les maîtres doivent autant que possible se trouver espacés à portée de voir et d'entendre, l'un dans la salle de récréation, un autre dans les passages, un troisième dans le corridor. Mais cette manoeuvre ne doit pas être aperçue. Chacun devrait être à son poste du moment, comme par hasard, et comme pour se rendre à sa besogne respective. 2. Tous doivent veiller au langage, aux manières et à la conduite des enfants, à chaque fois qu'ils se trouvent avec la communauté. 3. À la chapelle, en promenade et en récréation, bien que le maître de salles ou le maître de cérémonies soit le premier responsable, cependant personne n'est exempt de reproche pour le mal commis par les enfants qui se trouvent autour de nous. 4. Chaque professeur doit être pourvu d'un cahier de notes; 5. Tous sont tenus d'avertir le Directeur des abus ou désordres qui se glissent dans la communauté; 6. Tous sont dans l'obligation d'avertir les Directeurs et de leur faire remarquer en particulier ce que ces derniers pourraient omettre; 7. Que tous s'efforcent d'agir cum unico sensu, de se donner des avis charitables et sans affection; surtout qu'ils ne se compromettent point dans leurs punitions, commandements, permissions ou défenses. En un mot, qu'ils se regardent tous, à chaque instant du jour, comme des missionnaires, travaillant par l'ordre de Dieu même."

Retranscription dans Dossier Querbes - Correspondance reçue par le père Louis Querbes - Volume 22 - 1848-1849, s.l., Les Clercs de Saint-Viateur, 1965, p. 170-175.

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Règlement du collège de Chambly par le P. François-Thérèse Lahaye, de Chambly, 10 octobre 1851.

"Règlement.

Qui regula vivit, Deo vivit. S. Aug.

Article I. Religion.

Comme les élèves sont placés dans cette maison, pour y être formés tant à la Science qu'aux vertus religieuses et sociales, ils doivent s'attendre à être réprimandés et même punis, quand ils emploieront mal leur tems, ou ne voudront pas se corriger dans leurs défauts. Or comme moyens d'arriver à la perfection exigée d'eux ils observeront, entr'autres, les points suivants: 1. de se confesser tous les mois; 2. d'assister à la sainte messe, et de réciter le chapelet tous les jours; 3. d'écouter avec attention les instructions données; 4. de ne proférer aucune parole grossière, mensongère ou calomniatrice; 5. de ne jamais se rendre à la messe ni aux vêpres sans un livre de prière; 6. de ne point scandaliser leurs confrères en aucune manière; 7. de ne lire aucun livre sans permission; enfin de répondre aux prières; 8. Dire le Benedicte et les Grâces, aux repas, à la maison de pension.

Article II. Charité.

La première et la plus excellente de toutes les vertus étant la charité, tous les élèves s'efforceront de la pratiquer en tout, mais spécialement vis à vis les uns des autres, et par conséquent ils devront éviter, 1. toute parole ou manière injurieuse à l'égard de leurs maîtres et à l'égard de leurs confrères; 2. tout mauvais traitement, aussi bien que toute querelle et tout faux rapport; 3. toute impolitesse envers eux, et moins encore envers les étrangers; 4. toute action capable de scandaliser ou de nuire. Outre l'amour qu'ils doivent à Dieu par dessus toutes choses, et au prochain en général, ils doivent aussi un amour de reconnaissance à leurs maîtres et spécialement au Fondateur de la maison, comme étant leur Bienfaiteur particulier. Enfin, qu'ils se souviennent que pour les tems qu'ils sont au Collège, leurs maîtres tiennent la place de Dieu à leur égard.

Article III. Politesse

Chez les mondains la politesse tient lieu de vertu et de charité; chez nous la politesse doit être fondée sur la charité. Quiconque aime Dieu comme il doit n'a pas de peine à aimer son prochain comme lui même et par conséquent pas de peine à lui rendre les devoirs que la politesse chrétienne requiert. Ainsi donc, les élèves devront être polis en toutes rencontres et à l'égard de toutes personnes. Pour cela ils auront soin: 1. de lever leur chapeau, en passant devant les maîtres, M. M. les ecclésiastiques, et tous les étrangers venant au Collège; 2. en rue, de céder le meilleur chemin aux personnes âgées et aux dames; 3. d'ajouter à leurs réponses Monsieur ou Madame, selon la personne qui leur parle; 4. de se tenir décemment et modestement en présence de leurs Supérieurs sans tourner la tête, jouer avec les mains, les meubles, frapper les chaises, les salir en y appuyant leurs pieds &&; 5. de ne point parler trop haut ni trop bas; 6. de vivre à petit bruit dans la maison; 7. d'écrire de tems à autre aux parents et protecteurs; 9. de pratiquer la modestie et la discrétion à la maison de pension; 9. ne point se jeter sur les meilleurs morceaux; 10. servir ou laisser servir les jeunes les premiers; 11. manger comme des chrétiens bien élevés; 12. avoir de la déférence pour les maîtres de la maison où l'on pensionne.

Article IV. Étude

Après la sanctification de nos âmes, et la formation du coeur aux bons principes et à la vertu, le but principal et même unique des élèves doit être leur progrès dans l'étude et leur avancement dans la Science. Il est de fait que non seulement la Religion et la piété non seulement ne nuisent point à l'étude, mais encore la favorisent, comme nous en avons des exemples dans les Saints, v.g. dans Saint Thomas, et Saint Grégoire le Grand. Mais outre la piété, il faut encore de l'assiduité, de la constance, de l'application, du goût et peut être un peu de passion. Et cela surtout, dans l'étude des matières qui nous plaisent le moins. Les motifs, les raisons que nous avons d'étudier avec ardeur sont les plus puissantes que l'on ait au monde, la nécessité pour tout chrétien de remplir les vues de Dieu sur lui, de plaire à ses parents, de satisfaire à ses maîtres et enfin de s'avancer lui même dans le monde. Cela posé comme règle générale, voici les précautions nécessaires pour étudier avec succès: 1. Répondre comme il faut à la prière, pendant laquelle on doit être à genoux, des deux genoux, et avoir les mains jointes ou les bras croisés; 2. Commencer par les leçons par coeur, faire ses exercices et ensuite lire si l'on a du tems de reste, après en avoir demandé la permission; 3. Avoir toujours les deux mains visibles sur le pupitre; 4. Ne point entasser des livres, papiers ou autres objets devant soi; 5. Ne jamais quitter sa place, sans une extrême nécessité; 6. Étudier à voix basse; 7. Être tellement occupé de son devoir que l'on ne voie ou entende rien, pas même le son de l'horloge; 8. Éviter de tourner la tête en arrière; 9. S'applique r à des matières qui regardent la classe prochaine.

Article V. Silence

Posons comme principe fondamental que sans le silence, il n'y a pas de communauté possible. Ainsi donc, 1. Ne parler jamais dans l'intérieur de la maison, excepté dans la salle de récréation; 2. Observez le grand silence depuis la prière du soir jusqu'au déjeuner le lendemain; 3. Éviter de parler pendant les cinq minutes; 4. aux Dortoirs et la Chapelle; 5. En classe; 6. à l'Église et à la Sacristie; 7. Ne parler jamais aux étrangers sans permission; 8. Si vous avez des plaintes à faire, ne criez point de votre place, mais faites signe au maître que vous avez à lui parler.

Article VI. Ordre.

Voilà un mot qui n'est compris des enfants qu'entr'eux et seulement pour ce qui regarde leurs amusements et leurs jeux. Cependant, il est de la plus haute importance qu'ils en comprennent la portée dès leur entrée au Collège pour tout ce qui leur appartient comme pour tout ce qui appartient aux autres. Nous n'avons qu'à ouvrir les yeux, pour voir l'exemple que Dieu lui-même nous donne de l'ordre dans toute la nature. Et quand nous n'aurions pas cet exemple, l'expérience seule nous prouve que l'ordre équivaut à richesse, et désordre à ruine. Si l'ordre est nécessaire à tous les hommes, il l'est plus particulièrement aux écoliers. L'écolier, disait un grand bienfaiteur de l'Éducation en Canada, peut se définir "Un animal destructeur" expression forte peut être; pourtant, l'insouciance, l'indépendance mal entendue, une sotte vanité, voilà trois défauts comme naturels aux jeunes gens réunis en communauté. Ils doivent mettre tous leurs soins à les déraciner, et pour cela se souvenir tous que d'autres qu'eux (leurs parents, gardiens ou protecteurs) gagnent le pain qui se mange au Collège; d'autres qu'eux travaillent constamment pour procurer à grands frais les hardes et les vêtements qui s'usent ou plutôt se déchirent et se gaspillent au Collège, par des jeux ruineux et non nécessaires. Mais afin de donner une idée pratique de l'ordre, chaque écolier devra: 1. avoir tout son linge marqué 2. mettre son nom une fois sur chacun de ses livres et cahiers; 3. ajuster ses mêmes livres dans la case de son pupitre, de la manière la plus commode et la moins embarrassante pour lui; 4. faire de tems à autre l'inventaire de sa valise; 5. ne laisser rien traîner ni au dortoir ni dans les corridors; 6. ne pas attendre que ses chaussures ou ses hardes soient trop usées ou trop déchirées avant de les envoyer au raccommodage; 7. Ne point mettre ses hardes d'hiver pendant l'été et réciproquement; ni ses hardes de dimanche les jours de semaine et vice versa; 8. réclamer aussitôt qu'il a perdu quelque chose, afin de le retrouver; 9. Ne pas avoir divers besoins factices, qui dérangent l'ordre de la maison, impatientent les maîtres et fassent perdre du tems; 10. Tâcher de ne jamais être le dernier arrivé aux exercices. (Quiconque aura de l'ordre, aura aussi de l'économie, car les deux ne sont qu'une seule et même chose.) 11. Avoir un petit livre de comptes pour marquer toutes ses petites dépenses, 12. Emporter son linge sale au lavage, le jour dit.

Article VII. Propreté.

Voilà une vertu civile et même morale en ce sens que nous sommes tenus de ne pas être un sujet d'ennui ou de désagrément à notre prochain. Or il n'est rien de plus désagréable au Collège que d'avoir un voisin malpropre, avec une tête mal peignée, des ongles noirs et crasseux, des habits gras et huilés ou déchirés, et surtout des pieds qui jettent une odeur (de fromage fort) putride. Ce désagrément s'évitera en observant les règles ci-dessous: 1. se laver le visage, les mains et le cou tous les jours, et les pieds tous les quinze jours en hiver et tous les huit jours l'été; 2. se faire couper les cheveux fréquemment et se peigner tous les matins, 3. changer de linge tous les huit jours en hiver, et deux fois par semaine en été; 4. ne jamais se coucher avec ses bas; 4. ployer son surplis, son jupon et ses autres hardes, après les avoir secouées, afin de ne point les mettre dans la valise, avec de la poussière. 5. ne point mêler le linge propre et net, avec le linge sale, ce qui serait non seulement malpropre, mais encore malsain.

Article VIII. Classe.

Cet article, qui se rapporte à l'Étude, a pourtant besoin de règles particulières. Le but de la classe est de prouver le résultat de l'étude. Si l'étude a été bien faite, la classe se fera bien. Toutefois, pour que le tems de la classe soit profitable pour tous, chaque écolier se souviendra de ce qui a été [dit] au sujet de l'ordre, et observera les points suivants: 1. Au son de la cloche prendre tous les livres, cahiers, en un mot tous les articles nécessaires à la classe afin de ne point avoir à déranger la maison, et perdre du tems, en retournant chercher les objets oubliés; 2. ne jamais marcher sur les bancs ni sur les tables; 3. Si l'on a omis une leçon ou un devoir, prévenir le professeur et ne point chercher à le tromper en lisant la leçon au lieu de la réciter; 4. ne pas écouter les souffleurs, et réciproquement ne pas les aider; 5. demander respectueusement et discrètement des explications sur ce que l'on ne comprend pas; 6. Ne rien laisser passer sans l'avoir compris; 7. Écouter et suivre, afin de profiter de la leçon ou des devoirs des autres; 8. Se faire un bonheur de suivre toutes les matières de la classe à laquelle on appartient; 9. enfin ne point sortir de classe sans savoir bien positivement quelles leçons et quels devoirs on devra rapporter à la classe suivante.

Article IX. Récréation.

La Récréation et les jeux sont aussi nécessaires et aussi profitables que tous les autres exercices, non seulement à la santé du corps et au délassement de l'esprit, mais encore au salut de l'âme. Mais d'un autre côté, nos récréations doivent avoir les mêmes conditions que les autres exercices, c.à.d. qu'elles doivent se prendre en tems et lieux et de la manière voulue par le règlement. Tout jeu n'est point permis, et toute récréation n'est pas utile. Afin donc de sanctifier ce tems trop souvent dangereux pour votre vertu, souvenez-vous: 1. de ne point anticiper sur le tems, et si vous voulez jouir de la récréation, ne la prenez point sur l'étude ou aucun autre exercice; 2. d'y éviter toute querelle, toute lutte, tout jeu de main, comme tout jeu dangereux ou indécent; 3. Éviter surtout la compagnie de ceux qui diraient de mauvaises paroles ou donneraient de mauvais exemples; 4. Éviter entr'autres jeux, le Saut de mouton, et la fronde; 5. Ne jeter jamais de pierres, ou aucune autre chose capable de blesser; 6. Ne coupez, ne détruisez aucun arbre, banc ou clôture; 7. Ne dépassez point les limites prescrites; 8. Ne sortez jamais du lieu de la récréation sans permission; 9. Ne jouez qu'avec ceux de votre camp; 10. Si par accident ou autrement, il vous arrive d'endommager quelque chose, n'attendez pas qu'un autre aille vous découvrir; 11. Lorsque la récréation a lieu dans l'intérieur de la maison, éviter de courir sur les planchers; 12. Ne sortez jamais deux à la fois du lieu de récréation; 13. N'allez jamais au Cabinet de lecture, sans qu'il y ait un maître présent; 14. Ne soyez jamais moins de trois ensemble, et évitez d'être toujours avec les mêmes. 15. Ne faites jamais aucun marché, troc ou échange entre vous; 16. Ne jouez aucune somme d'argent ni aucune chose appréciable à prix d'argent; 17. Les cartes ne sont que tolérées.

Article X. Promenade.

Si nous devons donner en tout lieu et en tout tems une bonne idée de notre éducation et de nos habitudes, c'est surtout lorsque nous sortons pour la promenade. Le public sur cet article est bien plus sévère que nos maîtres eux mêmes. Il attend de nous un dehors et une démarche tout à fait exceptionnelle. Afin de répondre à son attente, nous observerons ce qui suit: 1. Être revêtu de l'uniforme prescrit; 2. avoir les cheveux, les mains et toute notre personne décente; 3. garder nos rangs et ne parler qu'à notre compagnon de promenade, sans tourner la tête pour entendre ce qui se dit derrière nous; 4. Parler à demi voix, au moins tant qu'on est dans l'enceinte du village; 5. Garder une distance de trois pieds entre chaque rang; 6. Ne point rompre les rangs, que le signal ne soit donné par celui qui préside, 7. Ne point s'écarter sans permission, et jamais au delà de la portée de la voix des maîtres; 8. Éviter de porter les mains dans les poches, derrière le dos, ou de passer le bras par dessus l'épaule ou autour du corps de son compagnon; 9. Par dessus tout respecter la propriété d'autrui et se faire grand scrupule de fouler sur le grain ou autre chose de clôturé à dessein d'être conservé; 10. Ne point couper de canne ou même de fleur sans permission.

Article XI. Modestie et décence.

L'observance de tous les articles énumérés assurerait sans doute l'accomplissement de celui-ci, mais la jeunesse est sujette à tant d'oublis et à de si continuelles distractions qu'elle a besoin d'une instruction à part, pour la modestie et la décence. Ces deux vertus ne doivent nous quitter jamais; elles sont de tous les jours et de tous les instants. Mais nous en avons surtout besoin à la chapelle, à l'église et au dortoir.

1. À la chapelle. Il suffit sans doute d'un seul et unique motif à des enfants chrétiens, ce motif est la présence réelle de N.S.J.C. dans le tabernacle, avec la célébration des saints mystères, à laquelle nous avons le bonheur d'assister tous les jours.

2. À l'église. Outre le motif déjà cité plus haut, nous en avons ici un second. Nous nous trouvons en présence de toute une paroisse, c.à.d. de 12 à 1500 personnes, qui ont les yeux sur nous, et jugeront de nos principes, de notre religion d'après le plus ou moins de modestie, le plus ou moins de décence que nous ferons paraître. Si nous nous comportons mal, les plus âgées seront indignées, les plus jeunes seront scandalisées; si nous nous comportons bien, toutes seront édifiées, et nous serons cause que Dieu sera glorifié et que la religion sera aimée et mieux pratiquée. Pour obtenir ce dernier si utile aux autres et si nécessaire à nous mêmes, prenons garde: 1. de nous rendre à l'église en ordre, en silence, la tête ni trop élevée ni trop baissée; 2. de porter les mains jointes; 3. une fois à notre place, de ne point remuer, regarder de côté et d'autre, mais au contraire d'avoir un livre de prières, dans lequel nous suivrons les parties de l'office qui se dit ou se chante; 3. d'accompagner, si possible, le chant; 4. d'observer, pour les signes de croix, génuflexions, frappements de poitrine, et les diverses positions, tout ce qui nous a été enseigné par le maître de cérémonies; 5. de ne pas courir ou même marcher trop précipitamment dans le sanctuaire; 6. de ne point rire ou se distraire et par là déranger nos voisins; 7. de nous arranger de manière à ne point avoir à sortir pendant les offices, que si nous avons à le faire, par un cas imprévu, demander la permission au maître du choeur, et de revenir le plus tôt possible; 8. ne point lire, feuilleter son livre ou jouer avec la barrette ou son mouchoir pendant le prône et pendant le sermon; 9. Pendant qu'on est assis tenir les mains jointes et visibles.

3. Au dortoir: 1. avoir une chemise de nuit; 2. changer de linge au lit; 3. coucher avec des caleçons; 4. au lit tenir les mains sur la poitrine; 5. éviter de porter la vue sur aucun objet indécent.

Article XI. Plain chant et cérémonies.

Loin de regarder comme un assujétissement [sic] gênant, le plain chant et les cérémonies, nous devons nous trouver heureux qu'on veuille nous charger de fonctions qu'on ne confiait jadis qu'aux confesseurs de la foi. Chaque élève doit donc: 1. Servir la Ste Messe à son tour, soit à la chapelle, soit à l'église; 2. faire exactement la partie qui lui sera assignée; 3. éviter de prendre aucune licence, à cette occasion, comme de rire ou parler à la sacristie sans nécessité, sortir et demeurer longtems [sic] dehors, arriver après les autres aux exercices, négliger ses devoirs de classe, faire connaissance avec les étrangers, et surtout de manquer l'audition de la messe ou des vêpres; 4. Prévoir d'avance, en regardant le tableau des cérémonies ce qu'il aura à faire le jour ou le dimanche suivant.

Article XII. Obéissance.

L'obéissance, raisonnable ou rationnelle, bien entendu, selon que l'exige Saint Paul, purifie, ennoblit et rend méritoires toutes nos actions même les plus petites et les plus insignifiantes. Elle est nécessaire, indispensable, par cela même qu'elle pèse davantage à notre nature toute pétrie d'amour propre et d'indépendance. D'ailleurs, la véritable indépendance ne consiste pas à faire notre volonté, nos caprices, mais elle consiste à remplir exactement notre devoir tel qu'il nous est tracé par nos Supérieurs légitimes. Celui-là est vraiment libre et indépendant, qui par son exactitude et sa régularité, sait se mettre au dessus de tout blâme et de tout reproche.

Maintenant, devons nous obéissance à nos maîtres de Collège? Oui, parce que l'autorité leur est donnée sur nous par nos parents. Il y a un contrat tacite entre le maître et l'élève, du moment que celui-ci entre au Collège; promesse sous-entendue de la part du maître de lui dévouer son tems et ses soins, et promesse de la part de l'élève d'obéir à tous les règlements du Collège. Les parents sont aussi censés naturellement à concourir de leur consentement à ce contrat.

Or, la nature de l'obéissance due par les élèves est d'être prompte, respectueuse et aveugle, prompte, sans quoi l'ordre serait détruit, respectueuse, sans quoi le maître perdrait le nom de maître, et l'élève n'aurait pas le caractère d'un enfant bien élevé, et le but que se proposent ses parents serait manqué, aveugle, parce que les enfants ne sont point censés savoir ce qui leur convient.

Article XIII. Discipline.

L'Autorité exercée sur les élèves sera toute paternelle, c.à.d. douce et ferme en même tems. La fragilité humaine est si grande que malgré leur meilleure volonté, les élèves ne pourront pas éviter toute faute. Et en cas d'infraction au règlement, tous les coupables doivent être justement et impartialement punis. Or tout maître a doit d'infliger des punitions, chacun à son endroit. Et les punitions seront infligées proportionnellement à la grandeur des fautes. Aucun maître n'est obligé de motiver ses refus de permission. D'ailleurs, il peut toujours dire, c'est contre la règle. Or voici l'ordre des permissions, 1. Chaque maître donne les permissions ordinaires, dans son département, 2. le Sous-Directeur donne toute permission ordinaire dans l'intérieur; 3. le Directeur seul accorde la permission de sortir de l'enceinte du Collège, 4. Tout élève qui obtient une permission du Directeur ou du Sous-Directeur doit prévenir son professeur ou le maître de salle qu'il a obtenu telle permission et de qui. 5. Strictement défendu d'aller ailleurs qu'à sa maison de pension au tems des repas; 6. Défendu d'y aller pour collationner.

Article XIV. Sanction.

Toute loi, pour être bonne doit être soutenue et mise en vigueur. Ceux donc qui ne se conformeront point au règlement, seront punis, jusqu'à ce qu'ils se corrigent. C'est l'objet de la discipline. Ceux qui refuseraient de s'y conformer, seront mis hors la loi, c'est-à-dire, qu'ils seront exclus. Mais pour donner toute la latitude convenable et toute chance possible de se repentir, nous réduirons les cas d'exclusion aux suivants, savoir:
1. Conduite immorale et scandaleuse
2. Habitude de paresse incorrigible;
3. Refus opiniâtre d'obéir au règlement.
4. Réplique insolente aux maîtres.
5. Sortie du Collège, sans permission.

Article XV. Maladie

1. En cas de maladie, prévenir le Directeur; 2. Obtenir un certificat du Docteur, pour s'absenter du Collège; 3. Ne point négliger les précautions indiquées par l'art. 5. Ne point jouer avec sa santé, et cela par religion autant que par amour pour sa personne, puisque Dieu nous a placés sur la terre pour y vivre aussi longtems qu'il jugera à propos.

Chambly, 10 octobre, 1851.
F.T. Lahaye ptre
c.s.v."

Retranscription dans Dossier Querbes - Correspondance reçue par le père Louis Querbes - Volume 27 - 1851, s.l., Les Clercs de Saint-Viateur, 1967, p. 188-194.

***

Lettre du p. François-Thérèse Lahaye.

"Chambly, 8 Novembre, 1852.

Mon Révérend Père,

[...]

Le corps enseignant est bien choisi et bien disposé à faire son devoir, la Communauté du Collège va mieux que jamais. Il s'y montre même cette année un air de piété et de dévotion inconnu jusqu'alors. La ferme modèle, bien que conduite sur une toute petite échelle, a donné de magnifiques résultats. Tout dernièrement nous avons été comblés de distinctions et d'honneurs. Mgr Bourget a bien voulu sacrer Mgr Larocque à Chambly et cinq évêques ont dîné avec 70 prêtres, dans notre salle de récréation. Elle se trouve encore toute décorée, comme au jour de la réception. En un mot tout semble réussir au delà de toute espérance là même où peu d'années auparavant tout semblait devoir infailliblement échouer.

[...]

J'attendais avec impatience nos règlements revus et corrigés, biffés et augmentés par vous. Si vous nous les envoyez, par quelle voie le ferez-vous ? Devons-nous les adopter tels quels en attendant, car j'en ai gardé copie.

[...]

Ah! s'il vous était donné de pénétrer dans quelque bonne Librairie à Lyon ou à Paris, pour y avoir des classiques français et anglais adaptés au système d'études qu'on nous a tracé ici! Mais non, il n'y a pas encore là ce qu'il faut. Il prendrait six années de la vie d'un homme dévoué et instruit, pour compiler, composer, refondre et catégoriser une suite de volumes ad hoc. Voilà ce qui fait actuellement ma peine.

Et puis savez vous une chose déplorable, mon Rév. Père, c'est qu'en brassant et remuant tant de choses à la fois, on se rouille, on devient paresseux pour les études sérieuses et relevées. Une seule ressource me reste, l'heureuse nécessité où je me trouve d'enseigner tous les jours un peu de théologie à nos scholastiques.

Un souvenir, s'il vous plaît, de tems à autre, en vos prières pour tous vos enfants d'outre mer et spécialement pour

votre enfant dévoué
F. T. Lahaye ptre
s.v."
Retranscription dans Dossier Querbes - Correspondance reçue par le père Louis Querbes - Volume 29 - 1852, s.l., Les Clercs de Saint-Viateur, 1967, p. 193-194.

***

Lettre, vraisemblablement du f.Philippe, supérieur général des Frères des écoles chrétiennes, à Mgr Bourget.

"Paris, 10 avril 1850.

À Monseigneur l'Évêque de Montréal,
Canada.

Monseigneur,

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt les détails que Votre Grandeur a daigné me donner dans la lettre qu'elle m'a fait l'honneur de m'adresser sur la position des sourds-muets de son vaste diocèse. Rien ne me serait plus agréable que de seconder les vues de sa paternelle sollicitude pour le soin de ces êtres si intéressants; mais je ne suis nullement en mesure de lui donner cette preuve de ma bonne volonté, parce que je n'ai pas de frères formés aux signes mimiques pour remplacer celui que je devrais ôter de Saint-Étienne avant de l'envoyer au Canada. Je n'ai pas même de frères disponibles que je puisse placer pendant quelque temps à Saint-Étienne pour s'y former auprès de leurs confrères; car notre pénurie de sujets est si grande que nous sommes en train de fermer des classes faute de sujets pour les régenter, et ce qui rend notre embarras plus grand, c'est que par suite des événements politiques nos noviciats sont loin d'être aussi peuplés qu'en 1847.

Quant aux livres et manuscrits qui pourraient nous être envoyés d'Orléans par M. l'abbé Laveau, nous nous ferons un devoir de les expédier à Votre Grandeur par l'intermédiaire du F. Facile, directeur de notre maison de Montréal.

Daignez agréer la nouvelle expression de mes regrets, et celle du profond respect avec lequel j'ai l'honneur d'être Monseigneur,

De votre Grandeur,
le très humble et très obéissant serviteur,
Philippe (?)."

Retranscription dans Collection de documents inédits par la Direction générale des Clercs de Saint-Viateur - Dossier Amérique - volume IV - La Mission de l'Industrie (Canada) 1850-1851-1852), Côteau-du-lac, Archives des Clercs de Saint-Viateur, 1959.

***

Mémoire de l'économe, f. Lucien Huot.

"le 20 décembre 1965

Notes au R. P. Provincial et
aux membres de son discrétoire,
relatives au projet de vente de

NOS ÉDITIONS d'HISTOIRE DU CANADA ET D'ARITHMÉTIQUE

I - Genèse du projet

Nos manuels d'Histoire du Canada et d'Arithmétique se vendent de moins en moins, chaque année. Édités entre les années 1951 et 1961, sauf l'Histoire du Canada de Farley-Lamarche, qui date de 1935, ces manuels ont vieilli vite. Nous pouvons même croire qu'ils vont bientôt mourir, sans avoir jamais vraiment conquis le marché, de sorte qu'ils auront vécu juste assez pour faire leurs frais.

Nous n'aurions sans doute pas songé à troubler leur lente agonie, si une occasion ne s'était présentée d'améliorer leur sort et même de leur ouvrir des perspectives d'avenir.

Vers la mi-octobre, les représentants d'une maison d'éditions nouvellement fondée, les Éditions du Renouveau Pédagogique Inc. (ERPI), manifestèrent l'intention d'exploiter notre fonds d'éditions classiques approuvées par le Ministère de l'Éducation ou qui ont encore un marché au Canada. Un ancien employé de notre Librairie, M. Roger Brissette, maintenant au service de la Librairie Dussault, à Montréal, connaît bien nos manuels et c'est probablement lui qui a suggéré ce projet aux directeurs des ERPI.

Dans les circonstances, les membres du discrétoire ont considéré que le projet pouvait être intéressant et le 30 octobre, ils ont accordé, à l'unanimité, leur accord de principe à la vente de nos éditions.

Puis, l'étude à été poussée dans les détails, en collaboration avec les acheteurs éventuels et nos conseillers techniques ou légaux. Un texte plus élaboré que l'ébauche initiale de projet, a alors été rédigé et confié à l'examen de notre notaire avec les recommandations des membres du discrétoire qui visaient principalement à sauvegarder nos droits d'auteurs. Notre notaire, Me Louis Bertrand, s'est adjoint un avocat expert en législation de droits d'auteurs et un troisième texte est né.

Ce texte a été étudié lors d'une réunion tenue à la résidence provinciale, le 16 décembre, sous la présidence de notre notaire et en présence de FF. Lucien Huot, Wilbrod Jacques et Georges-Henri Allaire,

Ainsi que MM. André Dussault, Pierre Tisseyre et Marc-Aimé Guérin, respectivement président, vice-président et agent d'affaires des ERPI.

Au cours de cette longue séance, le texte a été étudié avec soin, le notaire apportant ses éclaircissements, article par article. La dernière clause, dite "résolutoire" que le notaire avait ajoutée au texte antérieur et qui constitue l'essentiel de la protection de nos droits, a été difficile à maintenir. Elle est fondée sur le droit commun qui est l'application courante en matière d'obligations civile et beaucoup plus simple et claire que la clause proposée par l'acheteur éventuel et mieux connue par eux, c'est la clause ordinairement utilisée dans les cas de droits d'auteurs.

Finalement, les parties se sont entendues et le texte actuel contient toutes les corrections ou additions de nos aviseurs et des membres du discrétoire.

Sur cette base, le notaire a rédigé un quatrième texte qu'il a remis aux parties, le texte même qui accompagne ces notes. Il peut être considéré comme définitif, aux fins d'étude en discrétoire.

II - Que sont les ERPI?

Les fondateurs des Éditions du Renouveau Pédagogique Inc. entendent se consacrer uniquement aux éditions de manuels scolaires et désirent présenter sur le marché aussitôt que possible, des séries de manuels approuvés. L'achat de notre fonds d'éditions qu'ils relanceraient à grand renfort de publicité, leur permettrait d'influencer immédiatement la clientèle du livre classique, préparant ainsi la voie aux rééditions qu'ils projettent de préparer selon les recommandations du Rapport Parent.

Pour nous, la question qui se pose est celle-ci: Qui sont au juste les propriétaires des ERPI? Si la lettre qui accompagne ces notes ne suffisait pas entièrement à garantir la solvabilité et l'honnêteté des directeurs de cette nouvelle maison, nous pourrions ajouter que ces Messieurs sont bien connus et bien cotés à Montréal comme hommes d'affaires et qu'ils nous paraissent composer une équipe avertie et responsable dont les moyens d'action et les influences sont considérables.

III - Pourquoi vendre ?

1. Nous avons déjà dit que nos manuels ne sont pas vieux, mais qu'ils sont déjà désuets. Pour conserver l'approbation du Ministère de l'Éducation, il faudrait les renover [sic] et nous n'avons pas les moyens de savoir présentement dans quel sens. Nous avons cependant l'impression qu'il faudrait de bonnes antennes logées au bon endroit pour prédire l'orientation de l'édition classique au Québec.

Nous savons seulement que le gouvernement veut obtenir de la collaboration française et c'est là que la présence de M. Tisseyre aux ERPI sera utile, tout comme celle de M. Plourde [le texte dactylographié porte "Patenaude" que l'on a biffé pour le remplacer par "Plourde"] à Québec.

2. Le stock existant. - Vendre notre stock et nos éditions à une institution capable de les mettre en valeur, est peut-être le seul moyen de récupérer le capital d'environ $50,000 que nous avons sur les tablettes de notre Librairie. Vendre présentement, c'est semble-t-il, profiter d'une dernière chance et donner à l'acheteur la possibilité d'en promouvoir la vente assez tôt dans les écoles et les commissions scolaires, pour profiter de l'année scolaire 1966-67. Sans quoi, les ERPI perdent un an.

3. L'avenir de nos éditions. - Vendre nos éditions, ce n'est peut-être pas un moyen assuré de garantir leur avenir, mais cela nous semble un moyen à tenter quand même pour la simple raison que nous n'avons pas l'intention de les renover nous-mêmes.

4. L'équipe des auteurs c.s.v. - D'après les opinions émises en discrétoire, nous ne pouvons pas songer présentement à reconstituer une autre équipe d'auteurs et d'illustrateurs, comme celle qui a été démembrée il y a quelques années. De plus, nous ne croyons pas sage présentement, d'investir une capital en hommes et en argent, dans un domaine qui échappe de plus en plus aux institutions religieuses et où les laïcs prennent de plus en plus d'influence.

5. Nous savons par ailleurs que les éditeurs religieux ont souvent mauvaise presse au Québec, ces temps-ci. Il ne nous semble pas avantageux de nous lancer dans l'aventure. D'autre part, nous ne voulons pas non plus aliéner à jamais aux générations futures de c.s.v., les droits d'auteurs en matière d'éditions scolaires. Et il nous a paru essentiel de prévoir une clause à cette fin.

6. Disons enfin que plusieurs communautés religieuses du Québec ont déjà vendu leurs éditions classiques. Les SS. des SS. Noms de Jésus et de Marie ont vendu à Beauchemin et la Congrégation Notre-Dame a vendu à Fides. Les Dominicains ont vendu à Dussault. D'autres communautés mettent des agents sur la route pour liquider leurs stocks à rabais pendant qu'il en est encore temps.

IV - Quoi vendre ?

Nous ne vendrions que nos manuels d'Histoire du Canada et d'Arithmétique actuellement approuvés. Nous conserverions les éditions Robert (enregistrées à Ottawa au nom des C.S.V.), c'est-à-dire la grammaire, les exercices et le livre du maître des exercices. Ces manuels ne nous rapportent pas grand revenus, mais ils sont encore approuvés et nous craignons qu'en les vendant, nous limitions nos possibilités d'éditer plus tard des manuels de langue française.

Il nous resterait la possibilité d'éditer dans les autres matières d'enseignement (sciences, langues, religion, etc.) et dans les matières cédées, nous pourrions continuer à éditer à des niveaux d'enseignement qui ne sont pas concernés dans la présente cession proposée. Ainsi, en arithmétique, nous pourrions éditer de la 6e année en montant. Voici la liste des manuels qui feraient l'objet du marché proposé:

Histoire du Canada
1ère Les Missionnaires au Pays des Indiens
- Guide méthodologique...

2e Les Français au Pays des Indiens
- Guide méthodologique...

3e Grandes Figures et Grands Faits
- Livre du maître
- Cahiers d'exercices

4e/5e Découvreurs et Pionniers
6e/7e L'Épopée canadienne
8e/9e L'Histoire de Notre Pays
Cours supérieur - Histoire du Canada

Arithmétique
1ère Pas à Pas - 1er cahier
- Pas à Pas - 2e cahier
2e Pas à Pas - 1er cahier
- Pas à Pas - 2e cahier
1e/2e 4 cahiers du maître: L'Arith. chez les Petits
3e De succès en succès
- Livre du maître
4e De succès en succès
- Livre du maître
5e De succès en succès
- Livre du maître

V - Conditions de vente

Nous résumons ici les principales clauses du contrat projeté et dont copie est annexée à ces notes.

1. Le stock en magasin est vendu au prix coûtant d'impression et un acompte de 15% de la valeur de l'inventaire cédé est payé comptant. Le reste serait payé aux C.S.V. au fur et à mesure de la vente par ERPI. Après 5 ans, les soldes en magasin chez ERPI pourront nous revenir si c'est notre désir, pour la valeur des frais de transport.

2. L'avenir de nos éditions est garanti de deux principales manières. D'abord ERPI s'engage à rééditer (corrections majeures) et à réimprimer [le texte initial porte "rééditer"] (corrections mineures) aussi longtemps que nos manuels existants auront un marché au Canada, même siils [sic] ne sont plus approuvés.

Notons ici que si, éventuellement, un seul de nos manuels obtenait la clientèle de la C.E.C.M., par exemple, il est probable que nos seuls droits d'auteurs nous rapporteraient alors plus annuellement que nos profits nets des dernières années sur l'ensemble de nos éditions en Librairie.

3. Notre participation. - Sans nous y obliger, le contrat prévoit qu'aucune réimpression ou réédition ne se fera sans que nous en soyons avisés et que dans chaque cas, ERPI devra nous offrir par priorité, à compétence égale, d'y participer.

4. Notre nom. - ERPI s'engagent à laisser le nom des Clercs de Saint-Viateur sur tous les manuels à paraître dans l'avenir, originant des éditions cédées. Nous pourrons cependant nous objecter à ce que notre nom figure un jour ou l'autre si nous le jugeons préférable.

5. Royautés. - La royauté est fixée à 10% du prix de vente net aux libraires, peu importe à qui nos manuels sont vendus (corporations, particuliers, etc.). En cas de participation totale aux nouvelles éditions, la royauté sera maintenue à 10%. Si notre participation est partielle, le taux de royauté sera proportionnelle [sic] à notre apport, mais dans aucun cas, la royauté ne sera inférieure à 4% du prix de vente net aux libraires.

Ce taux de 4% a été jugé très avantageux par notre expert en matières de droits d'auteurs. À supposer en effet que nous ne fassions pas un pouce d'ouvrage à nos éditions à l'avenir, nous continuerions de bénéficier d'un droit minimum de 4%. Ce qui, en pratique veut dire que si un manuel valant actuellement $2.00 est réédité plus tard pour être vendu $4.00, le minimum pour nous serait en réalité de 8% en comparaison de ce que nous avons cédé initialement. C'est beaucoup, si l'on considère que, présentement, nos ventes de manuels classiques nous rapportent moins de 10% de profit net moyen, toutes dépenses payées.

6. Droits annexes. - La clause résolutoire dont nous avons parlé en page 2, semble nous accorder toutes les protections normales. À ce point de vue, cependant, il serait téméraire de prétendre qu'aucun problème ne se présentera jamais. Les solutions idéales n'existent pas, nous avons le devoir d'y tendre.

Conclusion.

La transaction projetée sort de l'ordinaire et nous n'avions aucune expérience de ce domaine pour fonder une opinion. Il s'agit d'autre part, d'une chose importante qu'il faut examiner avec soin avant de prendre une décision. Même si nos acheteurs éventuels nous pressent, il convient de prendre le temps nécessaire pour prendre une décision en connaissance de cause. Pour ma part, j'ai la conviction que l'affaire est avantageuse après l'avoir étudiée le mieux possible.

Lucien Huot, c.s.v.,
économe provincial,
.
Outremont, le 19 décembre 1965."

ACSV, dossier Vente de nos manuels classiques aux éditions du Renouveau pédagogique, boîte AV2/C29, Manuels scolaires - Projets réalisés.


Page modifiée le : 16-05-2016
 

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