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Sources imprimées

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1963

Bouchard, Maurice. Rapport de la Commission d'enquête sur le commerce du livre dans la province de Québec. S.l., s.n., 1963. 250 p.

CHAPITRE VII

QUESTIONS DIVERSES

1 - Édition et diffusion des publications du gouvernement de la Province

Nous avons pu constater, au cours de l'enquête que les divers ministères et services du Gouvernement de la Province publient un nombre très considérable de périodiques, de rapports et d'ouvrages. Cette production est faite dans la plus complète anarchie. Dans chaque service et chaque ministère, un peu tout le monde s'improvise éditeur. L'Imprimeur de la Reine s'occupe exclusivement d'éditer la Gazette officielle. Le titulaire actuel est un technicien de l'imprimerie.

Les inconvénients de ce désordre sont évidents. Du côté de l'édition, on s'expose couramment à mettre en circulation des publications mal présentées, d'autres qui font double emploi avec des publications déjà existantes ou qui sont tout simplement inutiles. Côté diffusion, le problème est ahurissant. Rien n'existe pour permettre au public de se renseigner, pour savoir par exemple quelles sont les publications gouvernementales, à quels prix elles se vendent, et à quelles adresses on peut se les procurer. Quant à la publicité faite à ces publications, elle est inexistante.

[p. 215]

Tout le monde sait qu'une démocratie véritable ne peut fonctionner sans un bon système de communications entre le public d'une part, et l'État et ses rouages d'autre part. En conséquence, nous recommandons au Gouvernement la Province l'institution d'une fonction d'éditeur officiel de l'État pour prendre charge de l'édition et de la diffusion de toutes les publications gouvernementales.

Il est possible que la fonction proposée soit créée par élargissement des responsabilités de l'Imprimeur de la Reine. Auquel cas, il serait important de définir convenablement les normes qu'un titulaire doit satisfaire pour s'acquitter de ces responsabilités.

2 - Distribution commerciale des ouvrages documentaires et éducatifs

À la suggestion du Ministre des Affaires municipales, faite dans une lettre datée du 10 juin 1963¹, l'Association des Éditeurs d'ouvrages documentaires et éducatifs nous a remis un mémoire² demandant une législation provinciale limitant la taxe annuelle exigée par les municipalités pour que les agents vendeurs de ces éditeurs puissent exercer leur activité de vente sur le territoire municipal. Ces maisons éditent et diffusent principalement les ouvrages encyclopédiques par l'intermédiaire de courtiers qui sollicitent le client directement.

Selon ce mémoire, le montant exigé pour le permi [sic] municipal varie de $7.50 à $50 selon les municipalités, par agent-vendeur, ou de $100 à $500 par éditeur. Sur les 85 municipalités qui, selon le mémoire,
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(1) Appendice F-I-25
(2) Appendice E-I-25

[p. 216]

exigent un permis pour chaque vendeur 18, soit plus de 20%, demandent $200 et plus.

L'Association souhaite une législation provinciale limitant la taxe municipale ou le permis à $15, dans le cas des municipalités dont la population dépasse 50, 000 âmes, et à $10 lorsque la population est inférieure à ce chiffre.

Les municipalités qui exigent présentement des taxes élevées pour le colportage ou toute forme de sollicitation à domicile de la clientèle peuvent, à cet effet, rechercher l'un ou l'autre des résultats suivants, ou les deux à la fois: en premier lieu, éliminer le plus possible la sollicitation à domicile et, en second lieu, procurer des revenus à la municipalité.

Si l'intention est de réduire la sollicitation directe des personnes sur le territoire de la municipalité, il vaudrait beaucoup mieux le faire par des règlements limitant le nombre absolu des permis et les champs de la sollicitation qu'en imposant une taxe arbitraire dont on ne peut prévoir l'efficacité.

Si le but poursuivi est de créer une source de revenus pour la municipalité, nous estimons que la vente des ouvrages éducatifs et documentaires, eu égard à l'aspect culturel de ce commerce, devrait donner lieu à une exception.

En conséquence, nous recommandons que le Gouvernement de la Province fasse le nécessaire pour obtenir que les municipalités de la Province, régies par la Loi des Cités et Villes et par le Code municipal, limitent la taxe municipale ou le coût du permis pour la vente des ouvrages documentaires et éducatifs à $15 dans les municipalités ayant une population de 50, 000 âmes et plus, et

[p. 217]

à $10 dans les municipalités ayant une population inférieure à 50, 000 âmes.

Nous avons pu noter, dans le cours de l'enquête, que le prix de vente au détail des ouvrages encyclopédiques est relativement très élevé; des collections distribuées ici au prix de $75 se vendent $25 à $30 en librairie à Paris. Il est vrai qu'en France, ces ouvrages sont vendus à la fois par les libraires et les courtiers, alors qu'ici on n'a recours qu'aux courtiers. Les coûts de distribution sont donc sensiblement plus élevés. Nous n'avons malheureusement pas eu le temps d'examiner cette question. Il nous est donc impossible d'exprimer un jugement à ce sujet. La commission du livre qui administrera la Régie que nous recommandons devrait examiner le problème attentivement et s'assurer qu'il n'y a pas abus de ce côté.

D'autre part, nous estimons anormal que les libraires ne puissent pas distribuer ces ouvrages. Depuis quelques années, les éditeurs de ce secteur refusent d'approvisionner les libraires en faisant valoir que les libraires vendent à rabais des ouvrages dont le prix est élevé en raison du coût élevé de la distribution par courtiers. Étant donné que nous avons recommandé que les libraires vendent les éditions canadiennes au prix fixé par l'éditeur, cette objection tombe et les éditeurs d'ouvrages documentaires et éducatifs n'ont plus de raison d'écarter les libraires du domaine.

Il est d'ailleurs à espérer que les libraires développent le plus possible leurs ventes de ces ouvrages. Peut-être alors serait-il possible d'en ramener les prix à des niveaux plus comparables à ceux qu'on observe à l'étranger.

[p. 218]

Nous recommandons donc que la Régie du livre prenne les mesures nécessaires pour obliger les maisons qui éditent et distribuent en exclusivité les ouvrages documentaires et éducatifs à approvisionner les libraires intéressés à vendre ces ouvrages.

3 - Formules M. A. pour l'importation

Sauf s'il est expédié par la poste, ce qui est relativement coûteux, l'exportateur de livres vers le Canada doit remplir en plusieurs copies des formules M.A. sur lesquelles il inscrit le détail de la marchandise exportée, titres, nombre d'exemplaires, valeurs, etc. Aussi bien les exportateurs étrangers que les libraires canadiens trouvent que ces formules sont compliquées, plus ou moins utiles, et coûteuses du point de vue administratif. Il semble, d'ailleurs, que seul le Canada a des exigences de ce genre.

Nous n'avons pas eu le temps d'examiner la question en détail. En conséquence, nous la signalons à l'attention de la Commission du livre qui sera chargée de l'administration de la Régie recommandée plus haut.

4 - Droits d'auteur et faillites

L'Association des Écrivains canadiens nous a soumis une recommandation concernant la protection des droits d'auteur dans les cas de faillite. Le principe de la recommandation nous paraît important. Nous n'avons, toutefois, pas eu le temps d'en examiner tous les aspects. En conséquence, nous la signalons à l'attention du Gouvernement:

[p. 219]

    "ATTENDU que les droits ou redevances dus à un auteur constituent la rémunération d'un travail au même titre qu'un salaire;

    ATTENDU que dans le cas de certaines faillites ou liquidations volontaires récentes, les droits ou redevances dus à des auteurs ont été relégués au rang des créances non privilégiées;

    QUE toute redevance due à un auteur pour des écrits publiés dans une publication qui fait cession de ses biens soit incluse parmi les créances privilégiées au même titre que les salaires et gages, et que la loi des faillites, si elle ne prévoit pas explicitement le cas, soit amendée en conséquence à la demande du Ministère des Affaires culturelles du Québec."

5 - Matériel didactique

Notre enquête portant sur le livre, nous n'avons pu examiner en détail le domaine du matériel audio-visuel et du matériel didactique utilisés dans les écoles publiques. Néanmoins, certains faits portés à notre connaissance nous inclinent à soupçonner qu'il peut y avoir dans ce domaine des abus du même genre que ceux que nous avons constatés du côté des manuels scolaires. Comme exemple, nous tenons à signaler le cas de mademoiselle Marguerite Ouimet qui a édité au Centre de Psychologie et de Pédagogie six petits cahiers d'exercices pour les 1ère, 2e et 3e années du cours primaire, et une série de quinze tableaux de lecture pour les élèves de la 2e année¹.
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(1) Appendice F-III

[p. 220]

Ces cahiers et ces tableaux ont donné lieu à des ventes totales de $1, 058, 800 et, pour l'auteur, à des redevances et profits de $313, 278, soit près de 30% des ventes totales. À première vue, ce montant de redevances nous semble disproportionné avec le travail et l'originalité requis pour produire ce matériel didactique. En conséquence, nous croyons qu'il est de notre devoir de signaler la question à l'attention de l'éventuel Ministère de l'Éducation.

[p. 221]

Page modifiée le : 17-05-2016
 

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