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Sources manuscrites
FILLES DE LA CHARITÉ DU SACRÉ-COEUR-DE-JESUS, SHERBROOKE

Intervieweur : Paul Aubin
Transcription : Mourady El-Hélou

13 septembre 2005, nous sommes à Sherbrooke chez les Filles de la Charité du Sacré-Cœur de Jésus. C'est Paul Aubin pour le dossier des manuels scolaires et nous allons parler des manuels avec deux religieuses de cette communauté qui ont été largement impliquées dans l'édition de leurs manuels scolaires et particulièrement dans la méthode de lecture dite méthode dynamique de lecture et de français ou méthode globale active.

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Q: Vous êtes ?

- Sœur Germaine Pouliot. J'ai commencé à travailler dans le secteur de l'éducation en 1957, mais après avoir enseigné quelques années au primaire, je me suis plus particulièrement intéressée à la méthode dynamique et à la recherche, à la rédaction, au Centre de Pédagogie Dynamique, à la formation des maîtres à l'Ecole normale Notre-Dame du Sacré-Cœur puis à l'Université de Sherbrooke, et tout cela en lien avec le Centre de Pédagogie Dynamique depuis 1964 jusqu'en 2001.

- Je suis sœur Suzelle Roberge. J'ai rejoint l'équipe du Centre de Pédagogie Dynamique en 1970, après mes études en psychoéducation à l'université de Montréal. Dans cette équipe, j'ai fait partie de l'équipe de rédaction et celle de la formation des maîtres de l'université de Sherbrooke, à l'université du Québec dans plusieurs régions. J'ai aussi fait partie de l'équipe "volante" comme nous l'appelions alors car nous allions comme personnes ressource dans différents endroits du Québec, mais aussi dans différentes provinces du Canada.

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Q: Merci, je pars le jeu avec une première question. J'ai pu comprendre que la méthode dynamique, ce que j'appelle votre marque de commerce, a été en fait partie par une religieuse française émigrée au Québec?

(S.G.) - Oui, Sœur Renée du Saint-Sacrement (Marie Antoinette Guinebretière) est arrivée au Québec, à Sherbrooke en 1926. Sa mission était de s'occuper des classes dirigées par les Filles du Sacré-Cœur-de-Jésus. Sa préoccupation première : essayer de laisser aux élèves leur capacité de découvrir par eux-mêmes les apprentissages de la lecture et de l'écriture comme ils l'avaient fait pour leurs premiers apprentissages avant d'arriver à l'école. Pour S. Renée, les enfants cherchent, ils essaient, ils se trompent, ils recommencent puis ils remportent des succès. Pourquoi ne pas commencer à apprendre à lire de la même façon? C'était pour S. Renée une question primordiale.

(S.S.) - Soeur Renée constatait, dans les visites des écoles, combien les enfants arrivant à l'école étaient inégalement développés. Ils arrivaient avec les connaissances de leurs milieux, de leurs familles et ils n'étaient pas tous comme on voulait le croire dans le temps "tabula rasa". Ils avaient une expérience personnelle de laquelle il fallait partir, selon S. Renée, pour les aider à avancer à leur rythme, mais tenant toujours compte de leurs connaissances premières. Elle était convaincue que les enfants avaient déjà un important bagage en arrivant à l'école.

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Q: Est-ce que c'est une méthode non seulement faite par une sœur de France mais ne se serait-elle pas inspirée de certaines recherches faites en France dans ce domaine-là?

- En France, des recherches se faisaient dans le domaine de l'apprentissage de la lecture, et sœur Renée avait des accès faciles, non seulement dans les écoles privées de France, mais aussi dans les écoles du système d'éducation publique; alors elle se tenait informée des diverses recherches et la lecture de nombreuses revues publiées en France et en Belgique.

(S.G.) - Sœur Renée connaissait la méthode globale expérimentée en France. Selon la méthode globale, les enseignants présentaient des mots aux enfants mais ils ne décomposaient pas le mot en syllabes puis en lettres. Alors, il s'agissait pour les élèves d'apprendre des mots, de les reconnaître, d'organiser des phrases. Pour S. Renée, il manquait un échelon important dans ce processus d'apprentissage. Elle disait: «Le mot n'a de sens que dans un contexte», alors elle est partie de la phrase et de l'analyse syntaxique de cette phrase : qui fait quelque chose, avec qui et pourquoi. Ensuite, elle propose la désarticulation des mots en syllabes et des syllabes en lettres avec association du phonème correspondant. C'est ce qui a fait qu'elle n'a pas voulu garder le nom de méthode globale mais qu'elle l'a appelée «méthode globale active».

(S.S.) - Autour des années 1961-1962, peut-être un peu avant, c'est devenu la «méthode dynamique» parce que la source de l'apprentissage était à l'intérieur de l'enfant et le sens du mot «dynamique» était lié vraiment au sens original du mot «dynamos» ce qui fait surgir, ce qui fait découvrir.

- Le mérite de sœur Renée du Saint-Sacrément était de s'entourer d'une équipe de pédagogues en plus d'une équipe de chercheurs. Tout ce que S. Renée concevait, elle le faisait expérimenter en classe. Je pense à sœur Fleur-Ange Denis, sœur Simone Arguin, soeur Honorine Prince. Ce sont les premières enseignantes qui ont expérimenté la Méthode dynamique des débuts.

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Q: Donc à partir des travaux de sœur Guinebretière vous avez commencé à publier vers les années 52-53?

- Il n'y avait pas de livres présentant cette pédagogie d'apprentissage. Soeur Renée a soulevé cette question auprès de l' évêque de Sherbrooke.

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Q: Cabana, à l'époque?

- C'était monseigneur Louis-Philippe Desranleau.

- Oui, S. Renée lui a dit: "On ne trouve pas dans les livres ce que je voudrais que les élèves puissent vivre comme apprentissage." Il a répondu: "Mais il faut les créer". C'est à partir de 1951 que sont parues les premières ébauches de la Méthode globale active; la première édition officielle, en 1952 avec le livre "La grande nouvelle". Et quand on regarde l'ensemble des trois premières années du primaire, on découvre en ligne de fond le thème de la famille. Renée, Alice et Guy, trois enfants auxquels les élèves pouvaient s'identifier. Les parents de la famille Denis sont davantage présents en 3ième année avec la visite de la maison familiale. Les lieux, décrits avec détails, fournissent aux enfants des repères dans l'espace. Deux lignes importantes, pour Sœur Renée du St- Sacrement: la situation dans le temps et la situation dans l'espace, des points essentiels à la sécurité affective, ces repères étaient très présents dans les manuels.

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Q: Si je comprends bien, vous avez édité sous le nom: les Filles de la Charité du Sacré-Cœur de Jésus jusque vers 1966-1967?

- A l'automne 1967, on a commencé à négocier les clauses d'un contrat d'éditions avec M. Gontran Trottier président de la maison Éducation Nouvelle.

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Q: J'aimerais revenir, avant de passer à Éducation Nouvelle, sur la période où vous étiez éditeurs de votre propre maison d'éducation. Aviez-vous une imprimerie ?

(S.G.) - Au départ nous avons eu la chance de travailler avec les Frères de l'Instruction chrétienne situés à Laprairie. Ce sont eux qui nous ont appris les étapes des travaux d'éditions.

(S.S.) - Dès 1957 à notre maison provinciale de la rue Bowen à Sherbrooke, nous avions notre imprimerie, et l'ensemble des travaux étaient exécutés par des sœurs. S. Céline de Jésus s'occupait de coordonner les travaux d'impression tout en étant illustratrice, assistée de quelques autres soeurs. C'est alors que nous éditions sous notre propre nom.

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Q: Mais c'était imprimé ici à Sherbrooke ?

- Oui, à Sherbrooke

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Q: Vous aviez votre imprimerie?

- Oui, sur la rue Bowen.

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Q: Dans cette période toujours, quelles ont été vos relations avec le Département de l'instruction publique, parce que il faut considérer la politique d'approbation des manuels scolaires. J'aimerais savoir si vous avez des souvenirs des réactions et du milieu administratif du DIP et du milieu des consommateurs qu'étaient des professeurs

(S.G.) - Je me souviens, j'étais postulante : il y avait une classe expérimentale avec une vingtaine d'enfants, voisine de nos salles de cours. Des représentants du Département de l'Instruction Publique sont venus voir ce que donnait cette nouveauté dans l'enseignement. Ils ont suivi régulièrement les premiers élèves de notre classe expérimentale. C'était au cours de l'année 1951-52, et notre premier manuel a été approuvé au mois de mai 1952.

(S.S.) - Moi, à cette période-là, j'entrais à l'Ecole normale Notre-Dame du Sacré-Cœur à Sherbrooke. Nous avions la chance de nous rendre comme normaliennes dans deux classes de la commission scolaire de Sherbrooke où des enfants apprenaient à lire avec cette nouvelle méthode. Vraiment nous étions émerveillées parce que les enfants mimaient et ils lisaient très rapidement. Mais ce qui nous frappait le plus, c'était l'enthousiasme des enfants à chercher des nouveaux mots qu'ils n'avaient pas encore appris. Ils cherchaient des signes qui leur permettraient de lire, et pour nous, c' était une très bonne occasion de découvrir que l'enfant est rempli de ressources.

(S.G.) - Ce qui était important au Québec, et je dirai même au Canada, c'était la nouveauté de la démarche d'apprentissage: on partait du sens pour apprendre à lire. Quand on pense à la lettre «A», elle n'a aucun sens; c'est dans un mot qu'on découvre une certaine signification, mais c'est dans un contexte plus large comme la phrase ou un court texte qu'on trouve le sens plus complet de l'expression écrite. Le fait que les responsables des études de diverses congrégations religieuses enseignantes se réunissaient régulièrement, permettait à sœur Renée de partager ses découvertes, ce qui a amené un certain nombre de congrégations religieuses à vouloir utiliser cette démarche d'apprentissage, et en particulier dans des classes d' Amérindiens. Parmi ces premiers élèves il y a eu ceux de la "réserve" de Mashteuiatsh, appelée autrefois Pointe-Bleue, sur la rive ouest du lac Saint-Jean, à l'ouest de Roberval; ceux de Betsiamites, en bordure du fleuve Saint-Laurent, au sud-ouest de Baie-Comeau. Je suis aussi allée travailler avec les enseignantes des Réserves de Manawan et d'Obedjwan, réserves situées dans le comté de Matawinie et en haute Mauricie.

- Dans ces pensionnats, on utilisait déjà la démarche de la Méthode dynamique depuis 1952 parce que le point de départ de la lecture était signifiant pour les enfants. Ils étaient capables de comprendre ce qu'ils lisaient, parce que le sens était lié à l'action, au dessin et à la réexpression dans des idées personnelles. C'était une nouveauté et une richesse en éducation. Cette richesse a vite été partagée avec les éducateurs des classes de langue française dans l'Ouest canadien. Je suis allée travailler avec des élèves de Vancouver de famille d'origine québécoise ou encore avec des enfants anglophones qui voulaient apprendre le français.

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Q: C'était à quelle date?

- En 1968-69, mais dès 1958-59, S. Cécile Mailloux et S. Fleur-Ange S. Denis étaient allées donner des sessions à des groupes d'enseignants intéressés par cette démarche d'apprentissage de la lecture. On se souvient des efforts de la «Survivance française» pour la sauvegarde de la langue. Sœur Renée avait participé à des groupes de discussions pour trouver la meilleure manière de « sauver le français » dans les régions de l'Ouest canadien. Elle s'est elle-même rendue à différentes reprises en Saskatchewan et en Alberta rencontrer des éducateurs de langue française.

- Revenant au Département de l'Instruction Publique, je veux ajouter que ce dernier a posé une condition à l'approbation à nos manuels scolaires: comme c'était une démarche d'apprentissage nouvelle et vraiment très différente de celle que les enseignants pratiquaient, le DIP a demandé que chaque commission scolaire qui voulait utiliser cette démarche d'apprentissage puisse compter sur des cours d'initiation et que l'implantation de cette nouvelle méthode soit supervisée par les auteures. Soeur Renée a donc formé un groupe d'animatrices auquel on a donné le nom de conseillers pédagogiques. On a commencé à offrir des cours d'été pour la formation des maîtres dès 1952. Cette formation n'en est pas restée uniquement à l'apprentissage de la lecture, car, pour sœur Renée, l'enfance était le lieu privilégié des apprentissages. Alors, à la formation en pédagogie de l'apprentissage de la lecture on a ajouté des cours ouverts sur différentes spécialisations: cours de psychologie de l'enfant, cours de mathématiques modernes, cours d'art graphique, cours de musique, cours de linguistique structurale et cours de phonétique. Tout ce qui touchait à l'enfant venait s'intégrer au programme de formation.

(S.G.) - Nous avons apporté un contenu particulier en linguistique structurale parce que l'ensemble de la démarche d'apprentissage de la lecture était basé sur la structure d'un énoncé, la structure d'un texte, structure qu'on perçoit, qu'on défait, pour voir comment c'est articulée dans la phrase, dans les groupes signifiants, tels les groupes sujet, verbe et complément dans le mot et la syllabe. C'est à ce moment que nous avons travaillé en lien étroit avec le Père Ernest Richer, s.j, docteur en linguistique. Il a suivi toute la recherche de sœur Renée du Saint-Sacrement et de S. Yolande Plante, spécialisée en linguistique structurale. Le Père Richer nous a axées sur le sens lié à la structure d'un ensemble dans la phrase. J'ai moi-même eu la chance de poursuivre mes études de maîtrise en éducation, et allant plus loin, j'ai voulu connaître comment la structure des phrases des textes français pouvait être simplifiée pour qu'on puisse la présenter aux élèves et non selon l'optique de l'analyse traditionnelle.

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Q: Je voudrais revenir sur un point, vous avez entretenu des collaborations avec différentes communautés, des frères et des soeurs; voulez-vous me rappelez le nom de la communauté des sœurs à Betsiamites ou est-ce que c'était votre communauté?

(S.G.) - C'était la communauté des sœurs Notre-Dame du Bon-Conseil. Leur maison mère est à Chicoutimi, et il y a eu aussi les sœurs Notre-Dame Auxiliatrices sur la Côte Nord, les sœurs Grises qui avaient des missions dans l'Ouest canadien. Il y a eu les sœurs du Bon-Pasteur de Québec. Je suis allée plusieurs fois chez elles, à Maillardville, en Colombie-britannique, les sœurs Sainte-Croix à Vancouver et à Edmonton, les Clercs Saint-Viateurs dans les classes pour enfants sourds. Nous avons travaillé avec une quinzaine de congrégations religieuses différentes.

- De 1968 à 1974, nous collaborions avec une vingtaine de conseillers pédagogiques avant que le Ministère de l'éducation crée cette forme d'aide aux enseignants du primaire. Nous nous rencontrions trois ou quatre fois par année pour des sessions d'études et des échanges. Nous allions aussi dans leur milieu pour nous enrichir de leurs expériences et de leurs recherches. - Certains de ces conseillers pédagogiques ont été employés à plein temps au Centre de pédagogie dynamique, en plus des soeurs qui y travaillaient déjà. Nous avions aussi une équipe volante venant de différents endroits pour animer avec nous les cours d'été et des sessions intensives en cours d'année. Comme nous avons vécu de bons moments avec cette équipe pédagogique élargie!

(S.G.) - Certaines années, du 1er juillet au 30 juin, nous avons rencontré jusqu'à 4000 enseignants pour des sessions de formation et d'enrichissement.

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Q: En dehors des communautés religieuses qui ont œuvré avec vous dans ce projet-là, quel a été l'accueil chez les professeurs laïques?

(S.G.) - Nous recevions un très bon accueil. Plusieurs directrices et directeurs d'écoles nous invitaient à aller dans leur école pour travailler avec les professeurs afin d'améliorer la connaissance en profondeur de la nouvelle pédagogie qu'ils voulaient utiliser avec succès. La proportion des religieuses par rapport à l'ensemble des enseignants était d'environ 10%. Nous donnions un certificat pour les cours suivis avec succès, ce certificat était reconnu par le Département de l'Instruction Publique, et ensuite par le Ministère de l'éducation. De 15, 30 ou de 45 crédits, ce certificat était reconnu pour quelqu'un qui voulait poursuivre ses études en pédagogie. Nous devions donc conserver le dossier de chaque éducateur et le mettre à jour, à chaque nouvelle session qu'il suivait, et cela depuis le début des cours en 1952.

(S.S.) - En 2000/2001, je suis encore retournée consulter ces fichiers pour répondre à la demande d'attestations pour des enseignants qui avaient suivi des sessions données par le Centre de Pédagogie Dynamique.

(S.G) - Nous avions également de très bonnes collaborations avec l'université de Sherbrooke et l'université du Québec à Trois-Rivières, à Drummondville, à Saint-Hyacinthe, en Abitibi soit à Amos et à Val d'or, et à Chibougamau. Grâce à l'expérience que nous avions auprès des enseignants et à notre constant désir de nous maintenir à jour en pédagogie, on a fait appel à nous pour travailler avec les enseignants, lors de la parution du nouveau programme qu'on appelait le programme cadre de français en 1971-72.

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Q: Ce qui m'amène peut-être à une dernière question concernant la première période que je pourrais qualifier pratiquement de préhistoire: votre communauté a agi comme éditeur jusqu'en 1962-63?

- Jusqu'en 1968-1969.

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Q: Est-ce qu'il y avait beaucoup de religieuses qui étaient impliquées dans la rédaction?

(S.G.) - Une équipe de religieuses engagées à temps plein rédigeaient les manuscrits et supervisaient les classes; d'autres assuraient les cours à la Formation des Maîtres. Quelques sœurs engagées dans l'enseignement ou la direction d'écoles ont aussi participé à la rédaction de textes et d'activités d'apprentissage, mais nous gardions la responsabilité de la planification de l'ensemble des projets et la supervision des activités de publication.

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Q: Il y a bien sûr des sœurs dont le seul emploi était la rédaction des manuels ?

(S.G.) - Non, pas à la rédaction seulement; les personnes qui ont participé à la rédaction étaient aussi impliquées dans l'enseignement à la formation des Maîtres, ou la supervision des classes. C'était une manière de demeurer en lien avec les élèves.

(S.S.) - Toutes les personnes qui faisaient partie de l'Equipe du Centre de Pédagogie Dynamique avaient été enseignantes auparavant. Il était important que notre Equipe soit formée de personnes complémentaires. C'est ainsi que nous comptions une religieuse formée en orthopédagogie, en psychoéducation, en linguistique et en mathématiques modernes. On travaillait sur divers plans. S. Renée aurait voulu qu'on puisse inventer quelque chose pour favoriser davantage la manipulation des faits de langue, comme de remplacer les groupes sujets ou les groupes compléments comme on pouvait le faire en mathématiques modernes. Maintenant, on le fait plus facilement avec les techniques de l'informatique.

(S.G.) - La manipulation des faits de langue était une technique importante pour sœur Renée; découvrir la mobilité des segments de la phase pour que l'enfant puisse saisir le sens de la phrase et la richesse du français. Pour elle, la langue s'apprenait en la manipulant verbalement mais aussi en la manipulant à l'écrit.

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Q: Donc, si je résume vous commencez à publier vers 52-53, vous avez eu un très bon accueil à la fois dans les communautés religieuses et au gouvernement et au Département de l'instruction publique. Alors, qu'est- ce qui fait que vous décidez de passer à une autre maison d'édition en 68-69 avec Gontran Trottier et publier chez Éducation Nouvelle ?

(S.G.) - On était préoccupées par la pédagogie plus que par l'aspect technique de l'édition. S. Céline de Jésus s'occupait de l'édition, de l'illustration et de l'impression des manuscrits, assistée de deux autres sœurs, mais la mise en marché était inexistante. De plus, on se rendait bien compte qu'il fallait faire du neuf dans l'illustration; on avait besoin de renouveler la conception des produits, les mettre à jour.

- Sœur Renée avait fait la connaissance de M. Gontran Trottier propriétaire d'une maison d'édition spécialisée en mathématiques modernes. Celui-ci voulait élargir ses productions au français. Au primaire ces deux disciplines sont enseignées par le même titulaire. Monsieur Trottier qui était d'abord pédagogue, était très intéressé par ce qui permettrait à l'enfant de progresser dans ses apprentissages. Comme nous étions déjà implantées dans plusieurs provinces du Canada il nous fallait améliorer les conditions de mise en marché. L'équipe des débuts ne s'attendait absolument pas à ce que la Méthode dynamique ait un rayonnement aussi important.

(S.G.) - En 1952, moi comme postulante, je me rappelle avoir travaillé à compiler des feuilles pour faire des cahiers d'exercices. Toutes les opérations se faisaient manuellement. Il fallait penser à des techniques plus modernes, plus efficaces aussi. Même dans le contenu des textes et des activités d'apprentissages, on ressentait le besoin de s'ouvrir à un nouveau langage, un vocabulaire plus contemporain. Par exemple la phrase «Le cheval noir tire la voiture rouge. » n'avait plus sa place dans les nouveaux modes de transport. Nous devions aussi passer du contexte d'une courte phrase à un contexte plus large, voir, un court texte. Nous devions proposer à l'enfant une situation de vie quotidienne où il pourrait mieux se retrouver.

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Q: Les jeunes auraient pu demander c'est quoi le cheval ?

- Oui! Avec l'urbanisation, il fallait changer les textes. De plus, S. Renée désirait utiliser les histoires composées oralement par les enfants. Au début de la Méthode dynamique, en partant d'un thème écrit au tableau on tirait une phrase. Maintenant le temps était venu présenter à l'enfant une histoire écrite complète. Ce ne fut pas seulement le fait de confier nos produits à un éditeur professionnel qui était nouveau pour le Centre de Pédagogie Dynamique, c'était aussi de risquer un point de départ dans l'apprentissage de la lecture plus complexe, en d'autres mots, c'était faire davantage confiance à l'enfant.

- Et nous sommes allées plus loin en 1987! C'est d'un livre complet que nous partions pour proposer l'apprentissage de la langue écrite, avec l'histoire de Cataradi. Un livre complet, pas simplement une seule phrase intéresse davantage l'enfant.

- Parallèlement à cet esprit de renouveau, nous avons eu une demande pour travailler au Manitoba en collaboration avec M. Delaquis du Ministère de l'Education, qui désirait trouver une nouvelle façon d'enseigner le français dans les écoles francophones. M. Delaquis venu à Montréal lors d'un congrès, avait entendu parler de la démarche de la méthode dynamique. Il nous a donc rencontrées. Il trouvait que faire appel à l'intelligence de l'enfant, à sa compréhension pour analyser ensuite ce que nous lui avions présenté, c'était la démarche qui s'apparentait le plus à leur façon d'apprendre en anglais. Et M. Delaquis nous a invitées au Manitoba. Dans le même temps le premier ministre Trudeau, par la loi 101, qui voulait respecter les droits linguistiques de tous les citoyens canadiens, favorisait l'ouverture de classes d'immersion française. C'est en partie ce qui nous a amenées à ouvrir un centre à Montréal : Le Bureau de Recherche pour les Ecoles bilingues et d'immersion, pour développer du matériel pédagogique spécialement pour l'apprentissage du français en immersion.

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Q: Au moment où vous passez chez Éducation Nouvelle de Gontran Trottier, êtes-vous en mesure d'évaluer quel serait le pourcentage des écoles qui, au Québec, à ce moment-là, auraient décidé d'utiliser la démarche dynamique?

(S.G.) - Je voudrais être modeste mais c'est un minimum de 75 %, des classes du premier cycle du primaire.

(S.S.) - Je vais vous dire pourquoi j'appuie ce chiffre-là et même je dirais un peu plus. Lorsque je suis arrivée au Centre de Pédagogie Dynamique, en 1970, on donnait des sessions dans de très nombreuses municipalités du Québec. C'est ainsi qu'on terminait deux cours à Bonaventure le vendredi soir pour ensuite commencer deux nouveaux cours en l'Abitibi, le lundi matin suivant.

- C'est vrai, ce doit être plus que 85%.

(S.S.) - En 1968, nous avons voulu mettre au service des élèves les fruits de la recherche de S. Colette Bergeron sur l'apprentissage, non pas seulement de la lecture, mais de la langue française dans son ensemble. A partir d'un texte de Félix Leclerc, Pieds nus dans l'aube, S. Colette propose une démarche d'analyse, puis de synthèse, d'un texte littéraire, mettant l'accent sur le temps, le lieu, les personnages, l'action, les sentiments et la beauté du texte dans l'expression de l'idée, selon la didactique psychologique de Hans Aebly. Poursuivant des études en vue de l'obtention d'un doctorat, S. Colette avait mené une recherche parallèlement en France et au Québec pour appliquer les principes de Hans Aebly aux élèves. Des conclusions fortement positives nous ont amenées à développer un nouveau matériel didactique pour le deuxième cycle du primaire selon la Pédagogie de la Découverte préconisée par S. Colette Bergeron. Un travail semblable a été réalisé à l'Institut de Boscoville de Montréal qui voulait une façon d'intéresser davantage des délinquants sachant à peine lire et écrire. Là aussi les conclusions furent positives. C'est à ce moment que la littérature a pris une plus grande importance dans la méthode dynamique de lecture et de français.

(S.G.) - Déjà, en 1953, on proposait aux élèves certains textes d'auteurs comme La chèvre de M. Seguin d'Alphonse Daudet, Le Petit Prince d'Antoine de Saint-Exupéry, mais c'était peu. Avec la publication de la thèse de soeur Bergeron, nous avons fait une place plus large aux ouvrages littéraires tels «Le secret de la rivière», «Panache l'écureuil», «Le conte du chien perdu», pour les élèves de 9 ans. Des fiches d'apprentissage portaient sur l'analyse des personnages, de l'action, du déroulement dans le temps et dans le lieu. D'autres fiches orientaient la recherche et la communication permettant aux élèves une synthèse personnelle à la suite de l'étude de l'ouvrage d'un auteur.

(S.S.) - Et c'est à cette période-là que nous sommes allées trouver des auteurs comme Suzanne Martel, Monique Corriveau, Henriette Major, Marie Bernard, auteurs québécois et d'autres auteurs français. Faire connaître et aimer quelques ouvrages de littérature enfantine du Québec et d'ailleurs. Tel était notre objectif.

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Q: Est -ce que le fait d'ajouter dans les exemples de littérature proposés aux élèves des auteurs québécois vous a posé des problèmes, soit du côté du gouvernement, soit du côté des consommateurs?

(S.G.) - A ma connaissance aucun. Félix Leclerc a même accepté de venir en classe rencontrer des élèves qui avaient interprété un de ses contes. Des auteurs comme Monique Corriveau et Suzanne Martel, Henriette Major acceptaient aussi de répondre aux questions que les élèves leur adressaient.

(S.S.) - Nous avons eu quelques difficultés avec les droits de reproduction. La maison d'édition de Gabrielle Roy demandait des droits tellement importants qu'on évitait d'utiliser ses textes. Nous avons demandé à Félix Leclerc de venir lui-même enregistrer un de ses textes; son éditeur refusait pour différentes raisons; nous avons allors écrit personnellement à Félix Leclerc qui s'est rendu au studio d'enregistrement où nous l'avons rencontré. C'est pour les enfants qu'il a bien voulu accepter. C'est extraordinaire d'avoir pu publier sur cassette pour les enfants de chez nous un texte lu par Félix lui-même.

(S.G.) - Au cours des années 1968-69, Hélène Biron, de l'équipe du CPD avait fait sa recherche de maîtrise sur la façon dont les textes d'auteurs marquent la personnalité de l'enfant. Les résultats de cette recherche nous ont amenées à davantage être attentives aux textes que nous choisissions pour les élèves. Avant les résultats de cette étude, nous choisissions des textes pour leur beauté littéraire et les situations d'apprentissage qu'ils permettaient d'exploiter, mais par la suite nous avons été plus attentives pour varier les modèles proposés aux jeunes afin qu'ils leur servent de repères dans la construction de valeurs sûres.

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Q: Je reviens à Félix Leclerc car j'avais entendu dire que vous avez eu certaines difficultés parce que certains fonctionnaires auraient trouvé que Félix Leclerc n'écrivait pas un bon français?

- Au cours des années 80, un nouveau programme de français imposait aux éditeurs de manuels scolaires de nombreux règlements à respecter pour que les manuels soient approuvés par le Ministère de l'Education. Il fallait passer par l'épreuve de l'Office de la langue française, de celle l'Office de la condition féminine. Ces exigences nous obligeaient à calculer le nombre de personnages féminins et masculins, le nombre de « il et elle, ils et elles ». Nous avions quelques 587 normes à respecter lorsque nous éditions un manuel de lecture: illustrations, présence de stéréotypes, équilibre dans les représentations de professions, etc. Or en présentant, pour le deuxième cycle du primaire, un texte de Félix Leclerc, l'utilisation de termes du terroir n'a pas été acceptée. Des fonctionnaires voulaient qu'on demande à l'auteur de changer ces noms. Or Félix Leclerc, on le sait, inventait parfois des mots au besoin et utilisait souvent des mots de chez nous, des mots d'autrefois. Dans «Pieds nus dans l'aube», il y a des expressions savoureuses qu'on voulait nous faire changer. C'est à ce moment-là qu'on a eu des difficultés liées à l'application de normes sans préoccupations pour le génie de la langue, et le respect de l'histoire.

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Q: Cette période de difficultés, pourriez-vous la dater à peu près?

- Il faudrait que je retourne aux commentaires reçus avec la feuille d'approbation, mais je crois que c'est vers 1978-80.

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Q: Donc, vous passez chez Trottier?

- Oui, 1968-69.

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Q: Dans mon catalogue j'ai des publications de votre communauté chez Éducation nouvelle de 68 à 73.

(S.G.) - En 1972, Éducation nouvelle était en difficultés financières et a été mis sous concordat. A ce moment, les livres de deuxième année venaient tout juste de paraître. Il nous fallait absolument continuer l'édition de nouveaux manuscrits pour les élèves de troisième année pour la rentrée 1973.

(S.S.) - C'était par boucle de trois degrés que nous planifions nos projets d'édition : 1ère, 2ème et 3ème années, puis 4ème, 5ème et 6ème années. En commençant une série de trois ans, on assurait les commissions scolaires de la fin d'un projet. Pour nous c'était une question d'honnêteté envers eux, mais surtout à l'endroit des enfants et des enseignants.

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Q: Le cycle au complet?

- Oui.

(S.G. ) - La congrégation a dû subventionner l'édition de 1973 sous le nom d'Éducation Nouvelle, en s'assurant vraiment que nous puissions être remboursées dès les premières ventes des nouveaux manuels édités.

(S.S.) - Ainsi, suite à la faillite d'Education Nouvelle, nous avons créé à nouveau notre propre maison d'édition appelée Les Éditions Projets. Pour nous, c'était temporairement, juste le temps de trouver une solution après la faillite.

(S.G.) - Les Éditions Projets ont opéré à partir de 1973. C'était la propriété des Filles de la Charité du Sacré-Cœur de Jésus. Nous sommes allées nous-mêmes chercher les films chez les imprimeurs; on a dû négocier ces films qui nous appartenaient légalement parce que les imprimeurs n'avaient pas été payés. Et je me souviens qu'on a eu d'énormes difficultés pour cinquante titres de la collection Les Jeunes Chercheurs parce que ces titres étaient disparus de la liste que nous devions reprendre.

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Q: Voulez-vous revenir sur Jeunes chercheurs?

- La collection Les Jeunes chercheurs avait été publiée en anglais par les éditions Gamma. Sœur Renée l'avait adaptée au français de la réalité canadienne. Cette collection était parue d'abord en Angleterre; les images de l'édition canadienne étaient les mêmes que celles de la version anglaise mais le texte était celui des Filles de la Charité du Sacré-Cœur pour des élèves canadiens. . La collection Les Jeunes Chercheurs proposait aux enfants de 7-8 ans une démarche de recherche avec un support visuel dans l'illustration et une fiche de recherche correspondant à chaque titre. Elle comprenait des titres très intéressants. Une belle collection cartonnée, rigide, attrayante! Et j'ai encore des arrière-neveux qui utilisent «Les Jeunes chercheurs» que j'avais offerts à leurs parents.

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Q: Et c'était publié ici ? Et c'était publié ici chez «Projets»?

- Non, chez Éducation Nouvelle.

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Q: Donc, c'est avant 73?

(S.G.) - Les Jeunes chercheurs sont parus au Québec au moment même des difficultés financières d'Education Nouvelle en 1971. Les titres de cette collection nous ont causé d'énormes difficultés au moment de la faillite parce qu'ils avaient été transférés sans notre accord.

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Q: Quand vous parlez de Jeunes chercheurs ce n'est pas la collection « Joyeux lecteurs»?

- Non.

(S.S.) La collection Les Jeunes chercheurs permettait un début d'initiation à la recherche tandis que Les Joyeux lecteurs étaient des livrets de réinvestissement du vocabulaire écrit dans les premiers livres d'apprentissage de la lecture. L'objectif des Joyeux Lecteurs était d'offrir aux élèves des occasions de succès en lecture en leur proposant des lectures de leur âge, abordables pour leurs premiers essais. Nous avions constaté que de tels livrets n'existaient pas au Québec.

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Q: Voulez-vous me situer «Études vivantes dans votre paysage»?

- «Études Vivantes» est une maison d'édition en lien avec une maison d'édition française, les Editions Larousse, je crois. M. Charles Letarte était le président de cette nouvelle maison d'édition canadienne, mais avant tout Études Vivantes était une filiale de Brace Harcourt Jovanovich , Orlando Fl.

- En entrant chez Études Vivantes, nous devions renouveler tout notre matériel didactique du 1er cycle et du 2e cycle du primaire, pour en faire une nouvelle édition complètement différente de l'édition précédente. Cette remise à neuf correspondait à un changement de programme au Ministère de l'Education du Québec. A la même période, nous rédigions aussi de nouveaux produits pour l'enseignement du français comme langue seconde, produits destinés aux anglophones des dix provinces canadiennes qui voulaient utiliser notre démarche d'apprentissage de la lecture et du français dans leurs classes en immersion française.

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Q: Est-ce en allant par le biais d'Études vivantes que vous avez élargi votre présence, qui existait déjà, chez les provinces anglophones pour l'immersion du français langue seconde?

(S.S.) - Oui, d'une certaine manière, mais c'était un projet déjà commencé avec Les Editions Projets. Avec la refonte de tous les manuels, c'était maintenant une collection spécifique à l'immersion, française, différente de la production pour l'enseignement du français comme langue maternelle.

(S.G.) - Pour la rédaction de cette nouvelle série, nous avions demandé la collaboration d'enseignantes qui oeuvraient en immersion française, de l'Alberta, du Manitoba, de l'Ontario et des provinces de l'Est.

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Q: Donc, via Études vivantes, vous avez plus que jamais un marché transcanadien ?

- Oui; et plus tard, Études vivantes a été repris par le Centre Educatif et Culturel.

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Q: Pouvez-vous apporter quelques précisions sur le Centre de Pédagogie Dynamique?

- Nous avons dû instaurer, dès 1952, un secrétariat bien organisé pour tenir compte des cours suivis par chaque enseignante et des visites effectuées dans les classes. Le nom donné à ce secrétariat qui couvrait l'ensemble de nos activités fut Centre de Pédagogie Dynamique. L'inscription aux cours offerts se faisait au CPD, les résultats étaient conservés, année après année, dans des fichiers qu'il nous fallait mettre à jour régulièrement. Nous avions des contrats avec une vingtaine de conseillers pédagogiques qui, dans leurs milieux, assumaient des cours de formation à leur Ecole Normale, selon l'esprit de la pédagogie dynamique, dont les résultats étaient aussi conservés au CPD. Le secrétariat employait une secrétaire à plein temps.

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Q: Sœur Roberge a fait allusion à des cours crédités. Il y a encore des gens qui demandent des attestations comme quoi ils ont suivi ces cours? - Oui, encore quelques-uns.

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Q: Si on faisait un retour un peu rapide. On a abordé les différentes raisons sociales sous lesquelles votre communauté a publié des manuels scolaires.

- On a commencé avec le nom de la congrégation Les Filles de la Charité du Sacré-Cœur de Jésus, de 1952 à 1968; c'est d'abord avec l'aide des Frères de I'Instruction chrétienne de Laprairie que nous avons commencé nos publications, ensuite nous avions nos propres imprimantes à Sherbrooke. Par la suite, de 1968 à 1972, nous avons travaillé avec Éducation Nouvelle. M. Gontran Trottier était très intéressé par les mathématiques modernes, et il reconnaissait que l'esprit de la méthode dynamique avait un avenir prometteur. Il nous a offert ses services pour l'éditions de nos produits. Nous avons accepté de travailler avec lui. Cette période malheureusement a été courte car M. Trottier était audacieux. Après avoir acquis le Centre de Pédagogie et de Psychologie, (CPP) il avait réparti les activités de sa maison sous différentes raisons sociales. Il pouvait ainsi inscrire des bénéfices d'une maison et les reporter au compte d'une autre déficitaire. Ce qui a perdu M. Trottier, je crois, c'est d'avoir acheté le Centre de Psychologie et de Pédagogie de la rue Faillon à Montréal.

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Q: Je me souviens d'avoir vu dans vos publications chez Éducation nouvelle l'adresse 260 rue Faillon.

- Oui, quand je dis que c'est cet achat qui a perdu M. Trottier, c'est qu'il a acheté le CPP avec un inventaire lourd qui ne se vendait plus; c'est, je pense, ce qui l'a conduit à une mise en faillite.

- De 1968 à 1973 nous avons travaillé avec Éducation Nouvelle, notre premier éditeur. Après la faillite, nous avions des manuscrits non édités et d'autres en cours d'édition. Nous savions que de nombreuses classes de troisième année de la province de Québec attendaient, pour la rentrée de septembre, la parution des cahiers d'activités et des guides du maître qui accompagnaient les manuels déjà imprimés. Alors nous avons vu nous-mêmes à l'impression des manuscrits pour que le matériel scolaire soit disponible à la rentrée. On a fait appel à du personnel compétent dans la production pour rencontrer ce défi. Nous avons dû créer une nouvelle raison sociale pour opérer légalement. On a choisi comme nom : Les Éditions Projets avec Madame Janine Gérard comme présidente de la maison. Les Editions Projets ont été en activité de 1973 à 1981. La congrégation a accepté ce défi par esprit de justice envers le milieu scolaire mais c'était convenu que nous ne voulions pas entrer dans le commerce.

- Dès que nous avons compris que les Éditions Projets devenaient revendables nous avons décidé de nous en départir. Il fallait choisir un éditeur parmi tous ceux qui s'intéressaient à nos produits. Nous avons choisi la maison Études Vivantes. Nous avons travaillé avec Études vivantes de 1981 jusqu'à 1987-1988. C'était une jeune maison, mais une filiale de Harcourt Brace Jovanhovich des États-Unis comprenant à ce moment-là au moins 500 éditeurs dans le monde. Mais voilà qu'en 1987, le propriétaire d'Études Vivantes décide, sans nous en informer, de transférer tous les produits d'Études Vivantes à la maison HRW, éditeur de manuels scolaires pour le secondaire. Or HRW était empêché de vendre des produits destinés au primaire dans les milieux de langue anglaise. Aussi nous n'avons pas accepté de passer de la maison Études Vivantes à celle de HRW. Nos contrats avec Études Vivantes nous permettaient de refuser. Alors nous avons dû éditer, une autre fois, nos produits sous la raison sociale du Centre de Pédagogie Dynamique; ce fut en collaboration avec M. André Vandal.

- Le Centre de Pédagogie Dynamique a dû agir comme éditeur de 1987 à 1991. Après avoir réglé les différends avec HRW et Études Vivantes, nous avons opté pour nous associer au Centre Educatif et Culturel (CEC). Nous devenions une équipe collaborant de très près avec les éditeurs du CEC de 1989 à 1996.

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Q: André Vandal ?

- Nous avions connu M. André Vandal en tant que chargé de projets chez Études vivantes pour le matériel destiné aux francophones (M. Clément Beaudoin également chez Etudes vivantes était chargé de projets pour le matériel de l'immersion), lorsque nous avons procédé à la refonde de nos manuscrits au cours des années 1981-1987 à la Maison Etudes Vivantes. De plus, lorsque le Centre de Pédagogie Dynamique a repris l'édition de ses manuscrits de 1987 à 1991, nous avions chargé M. Vandal de l'édition de nos manuscrits.

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Q: N'avez-vous pas travaillé avec une autre maison pour les sciences humaines?

- La Maison Beauchemin a demandé notre collaboration comme auteures dans une équipe multidisciplinaire, regroupant les sciences de la nature, les sciences humaines, le français et les mathématiques. Nous étions responsables de la partie française et des sciences humaine pendant que d'autres étaient responsables des sciences de la nature et des mathématiques. Nous travaillions en collaboration avec M. Clément Robillard, conseiller pédagogique, chargé du projet. On le retrouve aujourd'hui dans le Réseau québécois des écoles entrepreneuriales et environnementales, M. Robillard était aussi auteur chez Beauchemin.

- Pendant la même période, le Ministère de l'éducation a fait appel aux éditeurs qui voulaient bien s'intéresser à l'autoroute informatique. Le Groupe Beauchemin nous a alors demandées pour participer à la rédaction de projets pédagogiques disponibles virtuellement. C'est avec M. Vandal que nous avons travaillé à ces projets. Notre responsabilité consistait à rédiger la partie d'apprentissage du français avec des supports pour les élèves et un guide pour les maîtres. Ce fut pour moi une heureuse expérience permettant une certaine animation interactive.

- Toujours en collaboration avec M.Vandal, en lien cette fois avec M. Ernest Godin de Pandore, nous avons rédigé des projets d'apprentissage de grammaire en créant des unités pouvant être utilisées en boucles sur cédérom. Notre participation consistait à rédiger des activités pour les élèves de 8, 9 et 10 ans et à créer des supports pédagogiques pour les enseignants.

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Q: Vers quelle date ?

- Au cours des années 1993-96.

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Q: Quand vous avez fait un test dans le site Internet pour votre communauté, c'est le premier titre qui est sorti, le dictionnaire?

- Oui, nous avons aussi produit un dictionnaire, un dictionnaire pédagogique. M. Vandal était aussi chargé de coordonner ce projet pour la maison CEC. Le dictionnaire CEC Intermédiaire est paru en 1992.

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Q: Peut-on peut retracer des sites où vos noms apparaissent comme étant des collaborateurs?

(S.G.) - Il y en avait quand je suis partie du Québec en 2001. Aujourd'hui je retrouve quelques sites avec la liste de certaines de nos publications. Je me rappelle deux titres de projets que nous avons créés en classe s'adressant aux écoliers de 9-11 ans et faits avec eux, dans le cadre des Projets Rescol: «Métiers d'hier et d'aujourd'hui» et «Soyons fiers de nos parterres! Décorons nos balcons!»

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Q: Pouvons- nous revenir sur le matériel des écoles d'immersion que nous avons évoqué plus tôt?

- (S.G.) - J'ai dit un peu comment l'esprit d'apprentissage en méthode dynamique était centré sur la compréhension du sens plutôt que sur les lettres. Très tôt les francophones des provinces anglaises comme le Manitoba, le Saskatchewan, l'Alberta, la Colombie-britannique, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle- Ecosse utilisaient nos produits pour enseigner le français comme langue seconde. De même, les écoles amérindiennes du Québec utilisaient nos produits pour l'apprentissage du français comme deuxième langue.

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Q: J'aimerais qu'on précise: quand vous dites l'utilisation dans les provinces de l'ouest, c'est pour l'enseignement du français aux anglophones surtout?

- C'est aux anglophones surtout, mais aussi aux francophones selon leur langue d'origine, mais parlant anglais.

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Q: Des francophones qui étaient en train de perdre leur langue?

- Oui, peut-être. Ils avaient émigré dans l'ouest canadien et, après deux ou trois générations, ils ne parlaient plus français.

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Q: Donc, ils ont tenté de récupérer les francophones anglicisés?

- Oui. La politique de 1971 relative au bilinguisme favorisait l'apprentissage du français pour les anglophones; je ne crois pas que les francophones pouvaient bénéficier facilement des mêmes avantages. C'est à Saint-Lambert près de Montréal qu'ont commencé les premières écoles pilotes d'immersion française. Nous avons été demandées comme consultantes au moment de la mise en route de ces écoles. Ceci nous a amenées à faire des recherches entre phonèmes, syntaxe de la phrase, concepts et vocabulaire propres à chacune des langues pour adapter nos produits, conçus initialement pour les francophones. On a tenté de réduire les textes des manuels destinés aux francophones, mais ce n'était pas la solution idéale. Nous avons choisi de produire une collection de livrets de lecture, Les jeunes lecteurs spécifiquement pour les élèves d'immersion française.

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Q: Je reprends ma question: c'était pour l'enseignement du français comme langue seconde ?

- Oui, c'est tout-à-fait cela. Un matériel d'apprentissage conçu pour des élèves de langue anglaise apprenant le français en classe d'immersion a été publié vers 1976-1977.

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Q: Vous dites une édition: voulez-vous parler d'un livre totalement différent ou bien de simples refontes?

- Pour les élèves de 6 ans au Québec francophone, nous avions quatre livrets de lecture pour l'année. En immersion, on utilisait, en 1976, les deux premiers livrets, mais les cahiers étaient totalement différents. Après la deuxième année en immersion, on a créé de nouveaux instruments totalement différents de ceux des classes francophones.

- En 1987, après une dizaine d'années d'expérience en immersion, nous avons lancé la collection Cataradi : Un grand livre, appelé le « Big Book », une cassette d'apprentissage avec lecture, chants et textes répétitifs. Des fiches et des livrets de lecture complétaient l'ensemble du matériel. Cette collection qui comprenait beaucoup d'illustrations avec des textes aux difficultés graduées, a connu un grand succès. Elle a aussi permis aux éducateurs de faire un grand bond dans la confiance aux possibilités d'apprentissage des enfants.

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Q: Qu'entendez-vous par «Big book» dans le manuel scolaire?

- C'est un grand livre collectif qu'on explore d'abord en faisant des hypothèses sur le contenu du texte à partir des images et qu'on vérifie par la suite. Le grand livre permet un apprentissage collectif, il offre des occasions d'entraide dans la construction du sens d'un texte; le grand livre favorise l'approche communicative.

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Q: Vous avez publié ça ?

- Oui, dans le matériel Cataradi: conçu spécifiquement pour l'immersion française.

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Q: On en parlé des liens que vous avez forcément eus avec le Département au tout début pour la méthode dynamique; après ça vous avez eu des liens avec le Ministère de l'éducation dans le cas de l'immersion. Est-ce que vous avez dû également naviguer avec le ministère chargé des immigrants ?

- Non, pas pour le Québec. Au Québec, les classes d'immersion françaises étaient peu nombreuses. Il y en avait à Saint-Lambert, puis dans l'ouest de l'Île de Montréal.

(S.G.) - Les ministères des dix provinces du Canada et du Yukon avaient approuvé cette démarche d'apprentissage. Ils nous demandaient de former les enseignants de leur milieu pour leur permettre de comprendre cette démarche et de l'utiliser avec succès.

(S.S.) - Toutes les provinces enseignaient la langue française avec cette démarche d'apprentissage.

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Q: Ce qui m'amène à parler également du rayonnement de vos publications hors Québec et hors Canada surtout. Avez-vous eu des ententes avec Casterman et avec Flammarion?

J'aimerais beaucoup qu'on aborde ces questions.

(S.G.) - Je veux d'abord commencer par l'influence que nous avons eue en France. Je suis allée quatre fois donner des cours en pédagogie aux enseignants du primaire intéressés à la pédagogie dynamique. Actuellement, je rencontre encore des sœurs, parce que je vis en France, qui disent: «Ah, oui, j'ai suivi vos cours en telle année, vous souvenez-vous?» Deux groupes de conseillers pédagogiques français sont venus au Québec voir quelles étaient nos ressources pédagogiques, comment on enseignait le français au primaire. Il n'y a pas eu de manuels édités pour la France, mais des applications de la démarche pédagogique.

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Q: Et donc, automatiquement, il y a eu de la vente de matériel d'ici en France, j'imagine?

(S.G.) - Il y en a eu, mais pas en grande quantité à cause des coûts de transport. De plus, le taux de change ne favorisait pas toujours l'exportation.

- De plus, nous sommes allées à quelques reprises travailler avec les enseignantes, comme personnes ressource, au Centre pédagogique de Mont Rouge, un centre de formation pédagogique avec des classes d'application dans la banlieue de Paris. On utilisait le matériel de la Méthode Dynamique dans ces classes et une des religieuses de cette école est venue à Sherbrooke pour s'initier à la démarche de la pédagogie dynamique.

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Q: Je présume que lorsque vous parlez de ces religieuses en France, c'est bien sûr les religieuses de votre communauté ?

(S.G.) - Non. C'étaient des religieuses dominicaines qui souhaitaient transformer leur approche dans les apprentissages au primaire. Ces religieuses tenaient aussi l'école Ste-Geneviève, en plein cœur de Paris, tout près de la Sorbonne, et à chaque voyage au Centre pédagogique de Mont Rouge, nous allions aussi travailler avec les enseignantes de cette école.- La première fois que je suis allée en France pour donner une session intensive de formation, j'étais avec S. Suzelle : 115 enseignantes étaient inscrites à la session. Nous étions un peu craintives les premiers jours, mais ce furent des expériences enrichissantes qu'on ne peut oublier.

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Q: Je veux bien comprendre que les liens entre le Québec et la France étaient tellement forts qu'en France on ait entendu parler de votre méthode. Mais voulez-vous me dire comment il se fait qu'en Polynésie on entend parler ... des gens du Québec.

- Nous avons effectivement donné des sessions de formation en Polynésie française aussi. Oui, comment cela est-il arrivé? Sœur René du Saint-Sacrement, toujours à l'affût de procédés proches de l'esprit de découverte, avait fait venir à Sherbrooke des théoriciens en mathématiques modernes tels Madame Madeleine Goutard et le professeur Dienes. Les mathématiques modernes sont devenues un lieu commun d'intérêt entre eux et S. Renée. Dans les classes où on expérimentait les math modernes, on enseignait aussi le français selon la pédagogie dynamique. Et en même temps L'Education catholique de Tahiti a demandé des personnes ressource à M. Gontran Trottier président de la maison d'édition Education Nouvelle, qui vendait le matériel Cuisenaire et éditait le matériel pédagogique de la Méthode Dynamique. Or M. Trottier nous a refilé la demande du Bureau de Direction de l'Enseignement de Tahiti.

(S.G.) - S. Estelle Jacques et S. Marielle Fortier sont donc allées à Tahiti en 1969, et moi je suis allée en 70. Les enseignantes ont dit: «C'est une démarche qui favorise la découverte, c'est bon pour l'enfant, mais il faut qu'il retrouve son milieu, son environnement.» Ce fut le point de départ de l'adaptation de la démarche pédagogique à une autre culture. Et c'est ainsi que nous avons édité «Histoire des Iles» avec un guide du maître, des cahiers, publiés par Éducation Nouvelle, spécifiquement pour la Polynésie française.

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Q: Imprimés à Montréal?

- Oui, imprimés à Montréal.

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Q: Pour la Polynésie française.

- Oui, pour les enfants de la Polynésie.

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Q: Et vous avez eu des échos sur le succès localement?

- Ce fut un succès. Nous avons continué quelques années à donner des sessions intensives de formation en Polynésie, et Estelle Jacques est demeurée sur place comme conseillère pédagogique.

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Q: Avez-vous eu des ententes avec Casterman et avec Flammarion?

- C'est la maison Education Nouvelle qui s'entendait avec Casterman et Flammarion pour que les livres Les Secrets de la rivière (Casterman), Panache l'écureuil (Flammarion) et Le conte du chien perdu (Bordas) soient disponibles en nombre suffisant pour répondre aux commandes des Commissions scolaires. Les livres tirés des deux autres ensembles étaient des Editions Jeunesse, propriété de M. Trottier et c'était donc plus facile de prévoir la disponibilité des livres de littérature.
Pour les dix ans : Le Secret de Vanille et Les Jardiniers du hibou de Monique Corriveau et Les morceaux de Soleil de Manoukia de Marie Bernard;
Pour les 11 ans: A la Conquête du temps de Henriette Major, Le Maître de Messire de Monique Corriveau et Surréal 3000 de Suzanne Martel.

- S. Yolande Plante, qui avait ouvert le CPD, est allée régulièrement au Honduras enseigner la pédagogie aux élèves de l'Ecole normale dirigée par les sœurs canadiennes, les Sœurs du Saint-Rosaire. Et après y avoir séjourné quelques mois chaque année, S. Yolande a formé une équipe de pédagogues pour faire sur place du matériel didactique, selon la démarche de la méthode dynamique, pour les enfants et les enseignants du milieu.

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Q: A votre connaissance, est-ce qu'il y aurait eu des publications ?

- Il y a eu des publications maison, pas une véritable édition professionnelle.

- Nous avons aussi cédé des droits d'adaptation et d'édition bénévolement pour des élèves malvoyants.

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Q: Et vous avez imprimé de tels livres?

(S.S.) - Ce n'est pas nous qui imprimions, car les besoins étaient très particuliers. Je suis allée à l'École Victor-Doré, j'ai vu la manière de communiquer des handicapés profonds. Leur front était muni d'une licorne, et avec cette licorne, les apprenants atteignaient une touche d'un clavier qui leur donnait un groupe fonctionnel en réponse; par exemple : René de la phrase «René joue avec un ballon ». Avec ces instruments perfectionnés et une démarche basée sur le sens des groupes sémantiques, ils réussissaient à apprendre à communiquer.

- Le Ministère de l'Education du Manitoba cherchait aussi à produire une adaptation pour des malvoyants; nous leur avons cédé des droits d'adaptation et d'édition bénévolement.

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Q: Quand vous parlez du Manitoba, vous parlez, bien sûr, pour les non-voyants ?

(S.S.) - Oui, pour les non-voyants. Il y a eu aussi certaines adaptations pour les handicapés mentaux au Québec.

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Q: A qui avez-vous fait appel pour les illustrations?

(S.G.) - De 1952 à 1967, sous le nom Les Filles de Charité du Sacré- Cœur de Jésus, l'illustratrice était S. Céline de Jésus, une sœur de la congrégation qui avait quelque talent en dessin, mais elle aurait eu besoin d'une formation plus spécialisée pour les manuels scolaires s'adressant à des jeunes. Ce n'était pas trop mal tout de même. Mais après 1965, le besoin de réviser les illustrations se faisait plus pressant.

- Avec Éducation nouvelle, c'était l'éditeur qui choisissait l'illustrateur. M. Trottier a confié les illustrations de nos manuscrits à Madame Claudette Rodrigue. Cette dame avait une formation en pédagogie et se préoccupait beaucoup de la manière dont l'enfant percevait le monde. Elle a illustré nos manuels par la technique du découpage, un peu comme M. Claude Lafortune.

(S.S.) - Après Madame Claudette Rodrigue, avec les éditions Projets, nous avons demandé à M. Lafortune d'illustrer le manuel Du soleil pour toi. Comme elles étaient agréables à voir les illustrations que M. Lafortune a réalisées! Je reste encore impressionnée par la façon dont il voulait que les élèves voient le monde à travers les textes et les images des textes. Lorsqu'il préparait les illustrations, il faisait venir des enfants de la rue pour les consulter, et il tenait compte de leur avis. Nous avons vécu de belles expériences de collaboration avec M. Lafortune et Madame Rodrigue.

- En synthèse, je peux dire que, lorsqu'on était responsable de la maison d'édition, nous choisissions nous-mêmes les illustrateurs. Avec Études Vivantes, nous faisions des suggestions aux illustrateurs. Nous devions intérioriser les éléments les plus importants des textes, comment ces textes étaient articulés pour faire des suggestions plus ajustées. Cela nous amenait à faire nous-mêmes la mise en page en indiquant la place des d'illustrations.

- M. Philippe Béha, connu internationalement, a réalisé de très beaux livres pour nos collections de livres de littérature enfantine. Nous avions des collections de vingt titres ou vingt-cinq titres à éditer, nous pouvions confier quelques titres à des illustrateurs différents; cela permettait une certaine variété dans l'illustration.

- De 1977 à 1981, nous avons réalisé un matériel audiovisuel pour les élèves de 9, 10 et 11 ans : un matériel sur cassette avec des diapositives pour mettre des élèves en appétit de lire, de comprendre les textes et leur faciliter la saisie des textes littéraires. C'était un coffret d'une quarantaine de diapositives pour les groupes de 4ème année; un autre coffret d'une trentaine de diapos pour 5ème année. Le projet pour le groupe de 6ème année n'a pas été édité. Des questions incitaient les élèves à faire des hypothèses, à s'entraider mutuellement dans la construction du sens, puis à vérifier leurs hypothèses par la suite et bâtir leur propre synthèse avant de lire le texte.

- En 1970-71, on a aussi édité des jeux d'apprentissage : une grande boîte de cinq jeux de lecture : Bingo, Lecto, Youpi, Rouli; cinq jeux différents pour développer chez l'élève de 7-8 ans les habiletés mécaniques en lecture.

***

Q: Et cela a été édité à l'époque chez

- Le Centre de Pédagogie Dynamique, juste après la faillite; c'était un produit en cours d'édition pendant les difficultés financières d'Education Nouvelle.

Fin de l'interview.
Révision S. Germaine Pouliot
20 novembre 2007

Page modifiée le : 16-05-2016
 

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