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Sources imprimées

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1935

Roy, Camille. Nos problèmes d'enseignement. S.l., Éditions Albert Lévesque, c1935. 221 p.

"Au surplus, il a été beaucoup question de nationalisation au dernier congrès [congrès pédagogique de 1906 pour l'enseignement secondaire]. Et il était évident que nos éducateurs ne perdent pas de vue que ce sont de jeunes Canadiens qu'ils ont à former, et que c'est pour la vie canadienne qu'ils les doivent préparer. Il a été surtout facilement admis que notre enseignement secondaire sera plus national, c'est-à-dire plus adapté aux préoccupations de l'esprit canadien, le jour où nos professeurs, mieux outillés qu'ils ne le sont encore aujourd'hui, seront en mesure de nous faire eux-mêmes les manuels classiques, et plus spécialement les manuels d'histoire et de géographie dont nos élèves ont besoin. Des voeux particulièrement pressants ont été émis à ce sujet, et nous espérons qu'ils seront vite réalisés." (p. 13-14).

Commentaires suite au congrès de 1917: "Mais il faut aussi enseigner l'histoire suivant des méthodes qui la fassent bien comprendre, et ce fut sur cet autre aspect de la question que les membres de la commission ont accumulé le plus de paroles et le plus d'observations. L'histoire peut facilement devenir dans les classes une matière négligée ou une matière encombrante; elle ne doit être ni l'une ni l'autre. Il faut donc éviter les leçons trop sommaires, et aussi les manuels trop volumineux. On sait quelles proportions ont prises depuis quelques années les manuels d'histoire et comme l'on s'en plaint maintenant en France d'où ils nous viennent encore. Nous ne devons pas tomber dans ces erreurs de mesure, et il faut à la fois adopter les meilleures méthodes d'enseignement, et aussi les manuels les plus efficaces.

La surabondance même du texte du manuel indique la meilleure méthode à suivre pour le professeur. Elle invite à comprimer la matière, à faire d'un chapitre une synthèse bien ramassée où se trouve l'essentiel, qui contienne avec les seuls faits nécessaires les idées qui les expliquent ou qui s'en dégagent. Tout cela doit être à la fois bref et suffisant, et cela demande évidemment une leçon préparée avec soin. Il y telles choses dans l'histoire universelle qui s'allonge toujours, sur lesquelles on ne peut plus s'appuyer ni s'attarder en classe, comme, par exemple, les récits de guerres, de campagnes et de batailles, celles-ci fussent-elles livrées par Napoléon. Ces récits restent dans les manuels où l'élève pourra toujours les trouver. Par contre, il y a l'histoire politique, sociale, religieuse sur laquelle il importe que l'élève ait des idées précises et suffisantes. C'est elle que le maître doit dégager du manuel." (p. 33-35).

"On a parlé à la commission d'histoire de tableaux synoptiques. Ils sont assurément une façon intelligente de travailler; ils rendront de précieux services, ils seront pleinement utiles à une condition, c'est qu'ils soient faits par les élèves et non par le maître. Le maître pourra enseigner la manière de les faire, au besoin les corriger. Mais que les élèves les fassent eux-mêmes. Ici encore, évitons la méthode passive.

L'étude de l'histoire du Canada a été l'objet d'une attention spéciale de la part de la Commission. Cette étude est, d'ordinaire, très soignée dans nos maisons. On regrette encore l'absence d'un manuel convenable. Quand donc l'enseignement de notre histoire aboutira-t-il à la composition d'un manuel qui lui fasse honneur? Espérons qu'à un prochain congrès, nous n'aurons plus ce regret à exprimer, ni ce reproche à faire à nos professeurs d'histoire du Canada. Les maîtres suppléent sans doute par leurs notes soigneusement préparées à l'insuffisance du livre; mais il serait bien désirable, et urgent, que nous puissions aussi montrer au public le manuel classique que tout le monde attend." (p. 37-38).

1935.03
Desjardins, Roméo. "Concours des Manuels", L'école canadienne, 10, 7(mars 1935):281.

"Document officiel - Commission pédagogique - Résolution du 5 février 1935

Le Président Général expose devant l'assemblée plusieurs requêtes des concurrents au Concours des Manuels classiques demandant qu'un délai leur soit accordé pour la présentation de ces manuels.

Après de longues et soigneuses délibérations, il est décidé:

a) De conserver, pour l'année 1935-1936 au moins, les manuels classiques déjà en usage dans les écoles de la Commission;

b) D'accorder aux concurrents un nouveau délai pour la présentation des nouveaux manuels classiques, en attendant les conclusions du présent comité d'enquête sur l'enseignement primaire et l'approbation, s'il y a lieu, du Conseil de l'Instruction publique. Cette décision amende la section 4: de l'article IV du Comité de Perfectionnement de l'enseignement primaire élémentaire et complémentaire adopté à la séance régulière de la Commission Pédagogique du 15 mai 1934;

c) D'avertir chacun des concurrents des décisions du dit comité au moins quatre mois avant la nouvelle date qui leur sera assignée pour la présentation de leurs manuels, afin qu'ils aient le temps d'y faire toute mise au point désirable ;

d) De tenir à la disposition de leurs auteurs les manuels ou manuscrits déjà présentés."

1935.03.18
Harvey, Jean-Charles. "Les manuels absurdes", L'ordre, 18 mars 1935, p. 4.

"Plusieurs se préoccupent aujourd'hui, et avec raison, de l'enseignement secondaire. Comme me le disait récemment M. Olivar Asselin, c'est là qu'il faut frapper les premiers coups, parce que là surtout se forme l'élite intellectuelle dont nous avons besoin pour affermir les institutions canadiennes-françaises, trop souvent dirigées par la médiocrité satisfaite. Mais on ne saurait négliger l'école primaire sans risquer d'amoindrir toute la valeur morale du peuple attendu que cette école est celle du plus grand nombre.

Il est vrai que l'enseignement primaire a progressé, chez nous, sinon en profondeur et en qualité, du moins en étendue, car les écoles se sont multipliées, la fréquentation scolaire s'est accrue partout et l'analphabétisme n'existe pratiquement plus chez les jeunes; mais n'importerait-il pas de reviser les programmes et les manuels, de façon à les simplifier ou à les éliminer en partie et à faciliter ainsi la tâche de l'élève et de l'instituteur?

J'ai examiné plusieurs des manuels en usage dans nos écoles publiques. Ils sont, la plupart, ou médiocres ou franchement mauvais. Les grammaires et les traités d'analyse ne valent pas ceux d'il y a vingt-cinq ou trente ans; les livres de lecture courante sont en partie infects, et les volumes historiques sont bourrés de naïvetés. Je ne vois guère là matière à former l'esprit et le jugement des plus jeunes. Plus tard, si j'en ai le temps, je commenterai chacun de ces ouvrages suivant son mérite - si mérite il y a.

Depuis quelques années, des élèves de l'école publique - pas les moins doués, je vous l'assure - ont particulièrement attiré mon attention sur deux petits volumes qui, en certaines années, accaparent presque la moitié de leur temps, sans profit réel, et leur enlèvent des heures précieuses pour l'étude de la langue, de l'histoire, de la comptabilité, de la géographie et autres sciences d'utilité immédiate. Il s'agit de la Morale et du Dogme de l'abbé E. Terrasse, deux livres indéchiffrables pour des enfants et qu'on leur impose sans savoir s'ils y apprennent vraiment autre chose qu'une science de perroquets.

Des imbéciles diront peut-être, après avoir lu ces remarques, que je m'attaque au dogme et à la morale catholique, quand ils devraient savoir qu'il est question de deux manuels que je considère impropres à enseigner vraiment aux enfants le dogme et la morale. Ces ouvrages, qui ont la prétention d'être mi-théologie, mi-catéchisme, ne sont, en réalité, ni l'un ni l'autres et ne servent qu'à embrouiller dans les jeunes cerveaux les notions très claires, très nettes et très simples qu'on a puisées dans le «Petit Catéchisme» et les commentaires appropriés. M'est avis qu'à moins d'étudier sérieusement la théologie, science difficile à laquelle les lévites de l'Eglise se consacrent pendant plusieurs années avant de recevoir les ordres, il faut s'en tenir à une apologétique rudimentaire et simplifiée qui ne s'attache qu'aux grands dogmes et au [sic] grandes lois de la morale. Tout le reste, chez les enfants, est non seulement inutile, mais dangereux, parce que la vision incomplète d'une multitude de problèmes religieux porte avec elle des objections sans fin qui naissent spontané-ment dans les esprits et qui les troublent profondément. Je suis certain de ce que je dis, car j'ai constaté le fait bien des fois.

Cettes, je ne nie par l'ensemble des vérités contenues dans les pauvres volumes de l'abbé Terrasse. Je prétends uniquement qu'ils causent une perte de temps et nuisent à la formation intellectuelle et morale,. J'ai consulté là-dessus au moins une vingtaine d'élèves de diverses écoles et tous, sans exception, m'ont affirmé: premièrement, qu'on les forçait à apprendre par coeur, mot à mot et rigoureusement, ces textes impossibles; deuxièmement, qu'ils n'en retenaient rien; troisièmement, qu'un grand nombre étaient forcés de quitter la classe pendant des heures et de manquer des leçons importantes pour réapprendre des mots manqués de l'abbé Terrasse. C'est une abomination comme texte et comme disposition. Il n'y a ni questions ni réponses: des pages entières se poursuivent sans un alinéa, et le pauvre enfant doit avaler toute cette bouillie d'une haleine.

J'ajoute que l'abbé Terrasse glisse, au milieu de choses vraiment sérieuses, des réflexions d'une naïveté inouïe. Il dira, par exemple, en parlant du châtiment éternel: "Personne n'est revenu de l'enfer, cela prouve que si on y tombe, on n'en sort plus" (sic). Ah! le bon billet qu'a La Châtre.

Il parlera de la magie noire qu'il attribue au démon, des sorciers dont il constate la rareté en pays chrétiens, des communications directes de l'âme avec le diable, et il ajoutera "Se servir de la baguette divinatoire pour découvrir les sources ou même les gisements de métaux ne semble avoir rien de diabolique, mais ce ne serait pas aussi naturel si on découvrait aussi les choses perdues, les traces des voleurs avec la baguette divinatoire". Est-il naïveté mieux réussie?

A propos de certaines fautes, il écrira: «Ces péchés sont appelés honteux, parce qu'ils font rougir ceux qui les commettent.» L'abbé Terrasse est évidemment une belle âme! Si la rougeur montait aux joues de tous ceux qui faillissent, Dieu qu'il y aurait de rouge dans le monde!

A la page 98 du Dogme sur la résurrection de la chair, le bon abbé affirme: "Les Apôtres, les Martyrs, les Docteurs et les Vierges auront de plus une auréole, à cause de la victoire spéciale qu'ils auront remporté [sic] sur le monde, sur le démon et sur la chair." C'est dire que quelques saints privilégiés, après la résurrection, porteront un petit chapeau de lumière qui les distinguera du reste des élus. C'est prouvé, c'est certain.

M. Terrasse sait évidemment tout de l'au-delà, puisqu'il dit catégoriquement que le jugement particulier a lieu à l'endroit même où l'âme a quitté le corps», comme s'il pouvait être question d'espace et de temps dans une affaire entre Dieu et l'âme.

Ce ne sont là que de menus exemples entre bien d'autres. Les réflexions que je fais là-dessus ont été faites par les élèves eux-mêmes qui me les ont rapportées, et c'est en les écoutant que j'ai eu la conviction que les volumes de l'abbé Terrasse sont plus dangereux qu'utiles à cause des doutes qu'ils font naître dans les esprits les plus éveillés.

On devrait revenir à la bonne vieille méthode du "Petit Catéchisme" expliqué et commenté, où le coeur et l'esprit trouvent leur compte et où l'élève perd beaucoup moins de temps à vouloir retenir un mot à mot stupide qui lui échappe sans cesse ou qui glisse sur son cerveau en laissant des traces profondes de mécontentement sinon de dégoût."

Page modifiée le : 17-05-2016
 

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